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le Kaléidoscope....

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25 octobre 2016

Police partout, Sécurité nulle part !

Policiers et gendarmes français viennent d’enchainer une huitième nuit de manifestations dites « spontanées » pour décrier les conditions dans lesquelles ils travaillent et dénoncer la montée des violences à leurs égards. De façon surprenante, les premières revendications ne visent pas leur sous-équipement, le manque d’effectif ou de moyens - même si ces réalités commencent désormais à arriver dans leurs discours.

Non, non ! Les premiers balbutiements de ces grands gaillards montrent du doigt la virulence et de manque de respect des trafiquants, des terroristes, des bandits et des criminels qu’ils viennent appréhender, ainsi que le manque de sécurité et le climat « chaleureux » qu’ils disent recevoir lorsqu’ils interviennent dans ce qu’ils appellent des « zones de non droit » ; Vous savez les fameuses « No Go Zones » françaises que les télés américaines décrivaient il y a à peine un an.

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Bon, ce manque de communication, nous pouvons le comprendre par « l’identité » qu’ils s’accordent à décrire aux micros qui leur sont tendus. Ils se présentent comme étant des fonctionnaires lambdas hors du champ syndical - qu’ils considèrent comme trop connoté - , comme des fonctionnaires apolitiques respectueux du code de déontologie de leur métier.

Alors que le gloubi-boulga des caméras n’est jamais avare de visuels et d’images choc, les télévisions, qui ne sont plus à un paradoxe près, ont pris le parti de flouter les visages et filmer les pieds des policiers mobilisés sur l’espace public. D’habitude, lorsqu’il s’agit de nous informer, de nous parler de manifestation ou de mobilisation, les médias préfèrent proposer à nos yeux curieux les visages ensanglantés et endoloris par les larmes, la haine et la violence des « fauteurs de troubles ». Des victimes des attentats en pleurs tenant le cadavre d’un proche aux Zadistes de Sivens, des manifestants contre la loi Travail aux déchemiseurs d’Air France, il faut bien que nous nous rendions compte de qui il s’agit et de ce qui se passe !

Plusieurs questions traversent dès lors l’esprit des observateurs aguerris que nous sommes : Cette manifestation est-elle inédite dans l’Histoire de notre pays ? Les manifestants sont-ils autant apolitiques qu’ils le prétendent ? Ont-ils réellement le droit de manifester de la sorte ? Comment le gouvernement et l’État doivent-ils réagir à cela ? Quels sont le contexte et les raisons de ce malaise ? Quelle police voulons-nous ?

En premier lieu, le kaléidoscope propose de jeter un regard dans le rétroviseur car il semble que des manifestations de policiers en colère, cela arrive quand même de temps en temps.

Depuis la libération, deux journées de grogne policière ont marqué notre Histoire : celle du 13 mars 1958 et du 3 juin 1983.

Rendons nous tout d’abord en 1958 ! Le 13 mars de cette année, des policiers en colère se rassemblent, hurlant et sifflant, devant les portes de l'Assemblée nationale. Ils réclament un réajustement de leurs salaires et des primes de risques. Ils affirment se sentir menacés par les groupes armés de la fédération de France du FLN – n’oublions pas qu’en 1958, la France est enfoncée dans la guerre d’Algérie – et dénoncent l’assassinat d’un de leur collègue quelques semaines plus tôt. Alors qu’en 1948, la police avait accepté le retrait de son droit de grève, cette fois-ci elle compte bien se faire entendre usant de son droit syndical. Bousculades, invectives, injures et quolibets vont finalement avoir gain de cause : une délégation sera reçue par les députés et aucune sanction ne sera distribuée ! Selon Le Figaro du lendemain: « la carence de l'autorité qui de ministère en ministère, de demi-promesses à demi tenues en demi-refus moins résistants encore laisse croître un énervement au bout duquel le mécontentement devient explosif. »

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Pour l’historien Emmanuel Blanchard, spécialiste de cette période, l'action sans précédent des policiers a alimenté la crise du régime parlementaire et « sapé les fondements de la IVème République ». Elle a prouvé la fragilité de l'allégeance policière au pouvoir et en mai suivant l'arrivée du général de Gaulle à la tête du Conseil sonne le glas de celle-ci.

Reprenons la DeLorean ! Le 3 juin 1983, une nouvelle fronde policière éclate suite à l’assassinat de deux gardiens de la paix en civil dans le IXème arrondissement de Paris. La manifestation, à l’appel de l’USCP,  qui réunit entre 1500 et 2000 agents (selon les syndicats et la police, pour une fois, ils étaient d’accord sur le chiffre!), décide de se rendre à la place Vendôme, siège du ministère de la Justice pour exprimer les inquiétudes et manifester leur colère à l’égard des ministres de l’Intérieur et de la Justice, aux cris de « Badinter, démission ! » et de « la Gauche est laxiste » (en forme de réprimande envers la suppression de la peine de mort par la France). En parallèle, une seconde manifestation de 2500 policiers a lieu à l’appel d’un syndicat proche de l’extrême droite, la Fédération professionnelle indépendante de police (FPIP) et s’est donné rendez-vous avec le président du FN, Jean-Marie Le Pen. Ce second défilé se rend alors place Beauvau, siège du ministère de l’Intérieur, qu’un cordon de CRS a laissé passé en soutien... Bien qu’autorisés à manifester, les policiers ont bafoué plusieurs règles en ce domaine (aucune déclaration préliminaire, certains manifestants en uniforme ou armés !). Le préfet de police de Paris, Jean Périer, a présenté sa démission et il a été mis fin aux fonctions du directeur général de la police nationale, Paul Cousseran.

A la lecture de ces deux mouvements, il convient de considérer qu’une mobilisation des forces de l’ordre n’est jamais apolitique dans le sens sociologique du message que celle-ci transmet à la population. Si la mission première de la police est avant tout de protéger, une manifestation corporatiste ne peut déroger aux règles sous peine de rendre illisible les revendications qu’elle souhaite adresser et surtout d’attirer l’antipathie de ceux qui devraient lui être reconnaissants.

D’ailleurs, l’Histoire ne se répète t’elle pas ? Que cela soit en 1958, en 1983 et en 2016, ce sont des agressions violentes contre des policiers qui amènent en réaction la colère et en suivant la réclamation de la reconnaissance par autrui par l’octroi de moyens supplémentaires. Identiquement, les climats anxiogènes des évènements politiques d’une époque impactent et amplifient le malaise ressenti par les forces de l’ordre. Les tentatives de récupération politique de l’extrême droite, à l’image de celle opérée en ce mois d’octobre par Rodolphe Schwartz, en 1983 par Jean-Marie Le Pen, n’ont pour buts véritables que d’attiser les tensions, et de fantasmer l’insécurité pour la fixer sur des individus et des territoires. Si pour eux, la fin justifie les moyens, les progressistes ne peuvent se contenter de bouts de sparadraps pour soigner les maux d’une société malade, et dont la violence n’est qu’un symptôme.

Comme nous l’avons vu pour la manifestation de 1983, les rassemblements de ces derniers jours ont eu lieu sans déclaration préalable à la préfecture de police, or l’article 431-9 du code pénal punit de 7 500 euros d’amende et de six mois d’emprisonnement le fait d’organiser « une manifestation sur la voie publique n’ayant pas fait l’objet d’une déclaration préalable dans les conditions fixées par la loi ». En effet, si les policiers, comme les militaires, n’ont pas le droit de se mettre en grève – conformément à l’article L-4121-4 du code de la défense – leur droit de manifester est plus trouble. Selon le code de déontologie de la police et de la gendarmerie qui date du le 18 mars 1986, les fonctionnaires de police ne peuvent, lorsqu’ils sont en fonction, exprimer ou manifester leurs opinions politiques, religieuses ou philosophiques. En civil et hors service, ils peuvent s’exprimer « librement » mais « dans les limites imposées par le devoir de réserve et par la loyauté à l’égard des institutions de la République », selon l’article 434-29 du code de déontologie. Dans une note consultée par l’AFP, le préfet de police de Paris, Michel Cadot, a justement rappelé aux agents de la police nationale leur « code de déontologie » et leur « devoir de réserve et de loyauté ».

Outre les anarchistes et les libertaires, nul ne peut penser que la République peut se passer d’une police. Dans sa caractéristique particulière et son trait d’humour, Gotlib avait bien déclaré : «  Un état sans police c’est comme une soupe sans moustache. »

Les questions qui se posent alors, sont de savoir quelle est la police en adéquation avec la société ? Et quel degré d’autorité les politiques estiment-ils nécessaire d’attribuer à la police dans les missions qu’ils désirent lui confier ? 

Balzac, dans Splendeurs et Misères des courtisanes, avait commencé à y réfléchir : « Les parquets, les Tribunaux ne peuvent rien prévenir en fait de crimes, ils sont inventés pour accepter tout faits. Sous ce rapport, une police préventive serait un bienfait pour un pays ; mais le mot police effraie aujourd'hui le législateur, qui ne sait plus distinguer entre ces mots Gouverner, Administrer, Faire les lois. Le législateur tend à tout absorber dans l'État, comme s'il pouvait agir. »

Le député Jean Jaurès, dans un discours devant la représentation nationale en avril 1894, dénonçait la violence de la police et l’usage d’agents provocateurs, notamment lors des grèves de Carmaux, « C’est ainsi que vous êtes obligés de recruter dans le crime de quoi surveiller le crime, dans la misère de quoi surveiller la misère et dans l’anarchie de quoi surveiller l’anarchie. (Interruptions au centre. - Très bien ! Très bien ! à l’extrême gauche.) Et il arrive inévitablement que ces anarchistes de police, subventionnés par vos fonds, se transforment parfois - comme il s’en est produit de douloureux exemples que la Chambre n’a pas pu oublier  - en agents provocateurs. ».

Alors oui, la vision idéale devrait se trouver entre le désir de prévention et le refus de la répression !

Pour revenir plus proche de notre époque et tenter de répondre de façon concrète au dosage à choisir, l’expérience menée de 1998 à 2002 pour une police de proximité fut à mon sens la meilleure réflexion politique sur le sujet, c’est à dire de savoir de quelle police nous souhaitons pour notre République.

Sous l’impulsion du gouvernement Jospin, Jean-Pierre Chevènement, ministre de l’intérieur aidé de son conseiller Jean-Pierre Havrin, décide en 1998 la mise en place de la police de proximité au sein de la police nationale. Il s’agit d’une doctrine d'emploi de la police au plus proche de la population, au sein même des quartiers dits « sensibles » ou en difficultés. Peu à peu, le dispositif est déployé sur l’ensemble de l’hexagone. L'objectif principal poursuivi par la création de la police de proximité réside dans la volonté de l’Etat de réduire le « sentiment d'insécurité », dans un travail alliant la prévention et la lutte contre les actes de délinquance. In fine, au delà du « vivre ensemble » à la mode et décliné à toutes les sauces, c’est autant une volonté de changer les relations entre le policier et l’habitant que de changer l’appréciation de l’un sur l’autre, et vice et versa. Bref, l’idée était de créer un partenariat humain et respectueux, une sorte de coproduction de la sécurité au cœur des lieux, des espaces et des territoires qui en ont besoin le plus.

Dès son arrivée au ministère de l'intérieur, en 2002, Nicolas Sarkozy prend la décision de supprimer la police de proximité mise en place par la gauche. Le 3 février 2003, en visite à Toulouse dans l’une des zones sensibles qu’il se vante de vouloir reconquérir, Sarkozy humilie publiquement, devant les caméras, trois îlotiers d’un commissariat de quartier: « La police n'est pas là pour organiser des tournois sportifs, mais pour arrêter des délinquants, vous n'êtes pas des assistantes sociales. Quelques jours plus tard, Jean-Pierre Havrin, alors directeur départemental de la sécurité publique de Toulouse et comme nous l’avons vu plus tôt, l’un des pères de la police de proximité, est muté pour des résultats jugés mauvais. Nicolas Sarkozy annonce vouloir intégrer l’intéressement et des objectifs chiffrés afin de mieux évaluer le travail des policiers.

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Cinq ans plus tard, suite aux échauffourées à Villiers-le-Bel (Val d'Oise) de novembre 2007, le projet des unités territoriales de quartier (UTEQ) est imaginé pour combler le vide laissé sur le terrain. A peine lancé, le dispositif phare du gouvernement en matière de sécurité est gelé et 2000 postes sont supprimés en raison de la révision générale des politiques publiques (RGPP) qui impose, ici comme ailleurs, une baisse des effectifs dans la fonction publique. La réalité urbaine et les critiques qui s’en suivent sont cinglantes. La police a changé de visage, elle ne vient plus dans les quartiers en difficulté qu’en intervention express, qu’en opération commando et elle a vêtu ses agents en « Robocop » les équipant de flash-balls, de tasers ou de casques pare-balles. Naturellement, les sentiments d’injustice amène à tendre les relations et la perception des forces de l’ordre. L’accueil leurs étant réservé devient glacial et brutal et les caillassages deviennent coutumiers.

Mais au fait, qu’a proposé le candidat François Hollande en 2012 coté Police/Justice ?

Tout comme Ségolène Royal, qui en avait fait l'une des 100 propositions de son pacte présidentiel en 2007, le programme du candidat Hollande prévoyait de recouvrer la police de proximité et de créer des « zones de sécurité prioritaire ». Le projet est donc présenté en 2012 par… Jean-Pierre Havrin : « Il s'agit d'implanter des "proximiers". Ce sont des équipes, toujours les mêmes, chargées de renouer le contact avec la population ». L'idée forte du projet est de remettre les policiers sur le terrain, le plus souvent possible pour « retourner les liens qui unissent police et population. Si la police est considérée comme une ennemie, alors on ne s'en sortira pas. ». Pour ce faire, François Hollande a promis la création de 9000 postes à répartir entre police, gendarmerie et justice avec de nouveaux agents affectés à la police de proximité ainsi que des CRS et des gendarmes mobiles « fidélisés » dans le cadre de cette police de quartier.

Juin 2016, la cour des comptes rend son verdict. Sur la période 2012-2015, sur les 9000 postes promis, seuls 390 emplois ont été réalisés. En sus, les actes terroristes qui ont touché la France cette dernière année ont réclamé une mobilisation de la police de tous les instants. Certes, la police a reçu une reconnaissance publique de la part des français après les attentats de Charlie Hebdo – au point que le chanteur Renaud ronronnait vouloir rouler une gamelle à l’un d’eux - mais le constat est sans appel : la reconduction de l’état d’urgence a mis les forces de l’ordre autant sur les crocs que sur les rotules.

En conclusion, les revendications actuelles des policiers sont peut-être justes sur les moyens à doter, mais accuser l’État d’être responsable de l’insécurité dans tout le pays, alors qu’ils sont censés travailler pour ce même État est quelque chose de très gênant. Policiers et gendarmes sont dépositaires de l’usage de la force et sont censés le respecter. Tenter de vouloir utiliser cette force et aller jusqu’à l’intimidation est irresponsable : c’est un détournement d’un outil qui est in symbole même de la démocratie. L’État providence, qui se veut l’antithèse de l’État policier, ne peut faire l’impasse sur la globalité du projet de société qu’il souhaite, sous peine de continuer à coller des sparadraps et risquer d’infecter les plaies par la peste brune.

Amitiés progressistes,

Laurent Beaud

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20 septembre 2016

Les Primaires: Pièges à cons!

A l’orée des présidentielles de 2017, les citoyens français aiguisent leur arme démocratique d’expression favorite : la guillotine électorale. Sous le régime de la monarchie présidentielle, le fameux adage « Le président est mort ! Vive le président ! » reste plus que jamais d’actualité. Alors que nombreux estiment que la constitution et les institutions actuelles sont dépassées ou inadaptées à notre époque, le fait de choisir l’Homme providentiel réveille et mobilise en eux, malgré tout, leurs désirs démocratiques de débats et de joutes politiques pour se rendre aux urnes.

Mais voilà, outre le désormais classique ballet des ambitieux et des ambivalents sur les devants de la scène médiatique, le peuple est toujours plus en proie aux doutes quant à la prise en considération de ses aspirations, quant à la véracité des intentions et des discours tenus, quant à l’efficacité, à la fidélité et au respect de ses choix intimes. Ces doutes se transcrivent, élections après élections, par le vote blanc, le refus de s’intéresser à autrui et en la chose publique (non-inscription sur les listes électorales) et par l’abstention massive.

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Il y a peu, le philosophe, Jean Salem, universitaire à Paris 1 Panthéon Sorbonne, animant un séminaire sur Marx au XXIe siècle, s’interrogeait sur l’utilité du vote et sur les résultantes du système démocratique. Selon lui, le système est volontairement construit de façon imparfaite par l’oligarchie. Le vote a perdu  sa valeur car les sondages et la caste politique le confisquent. Il ne reste que l’illusion du choix et les élections ne pourraient à nouveau être utiles que s’il existait un mouvement populaire et révolutionnaire structuré hors les partis, qui puisse reprendre la fonction tribunitienne du PCF.

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D’ailleurs, en introduction de son ouvrage Élections, piège à cons ? Que reste-t-il de la démocratie ?, Jean Salem avait déjà prévenu: « De façon bien plus générale, la marche toute prosaïque des régimes dits « représentatifs » conduit toute personne sensée à penser, avec Alexis de Tocqueville, que « ceux qui regardent le vote universel comme une garantie de la bonté des choix se font une illusion complète ». Le « vote universel », ajoutait Tocqueville, «a d’autres avantages, mais non celui-là». Car rien ne dit que la majorité a toujours raison. Surtout lorsque la majorité est aussi évidemment fabriquée qu’elle l’est aujourd’hui. Sans parler de la masse immense de ceux qui ne jouent plus au jeu d’élections si souvent décevantes, déroutantes, ahurissantes, même. ».

Au delà de la critique globale et amère de Salem, il convient de considérer à l’image de Jean-Paul Sartre, que la construction de la sélection d'une candidature via l’organisation de primaires – à droite comme à gauche – « dissout le pouvoir du peuple », celles-ci excluant sociologiquement des pans entiers de la société, comme notamment les jeunes, les classes populaires ou les classes moyennes, de l’expression d’un choix que ces primaires entendent constituer.

En sus, comment comprendre que d’un côté l’on dénoncerait l’abstention d’un trop grand nombre de nos concitoyens – cette abstention permettant de gonfler, en valeur relative, les scores obtenus par le Front National – et que de l’autre, par l’organisation de primaires et par la sélection qu’elles induisent, l’on retirerait du choix des possibles le projet, la ligne politique ou le candidat qui correspondrait mieux à la vision des choses de ce même grand nombre de citoyens/électeurs, les poussant à retrouver la passion printanière de la pêche à la ligne, pour ne pas dire à s’abstenir ?

Dans son Antimanuel d’économie, Bernard Maris avait déclaré avec une pirouette « les libéraux sont des adeptes du darwinisme social, de l’élimination des faibles par la bienveillante sélection naturelle. ».

Longtemps, l’on nous a fait croire que pour cantonner les ultralibéraux, les extrémistes et les nationalistes, nous devrions adopter les préceptes des primaires américaines, qui organisent la bipolarisation de l’échiquier politique, sélectionnant et proposant des candidats sous l’unique aspect de l'image qu'ils désirent se construire et faire paraître à coup de monaies sonnates et trébuchantes, et éliminant tout ce que les composantes jumelles bipolaires considèrent comme minoritaire et à la marge. 

Dans la France du XXIème siècle, c'est un non-sens et une erreur de penser les choses ainsi. Il suffit d’observer rétroactivement la capacité qu’a eu le Front National à se placer au centre du jeu, sans réellement s’y impliquer, et à définir le jeu lui-même comme son adversaire. En se positionnant alors en antisystème de ce qu’il a dénommé «l’UMPS », celui-ci a réussi à créer une nouvelle bipolarisation – lui contre les autres –, permettant la qualification de son représentant au second tour de l’élection présidentielle de 2002. N’oublions pas que cet épisode désastreux a engendré l'hydeux « vote utile » qui n’a cessé depuis à être rabaché à l'oreille des électeurs en leur faisant craindre la peste brune, et qui in fine les a pousser à voter le plus vite possible, et ce afin de briser les alternatives au pouvoir en place et les projets de construction d’une autre société.

Si la principale caractéristique de l'américanisation de la politique française est qu'elle ne porte pas tant sur les débats d'idées que sur le style et les mécanismes de désignation des candidats et de pouvoir, pourquoi poursuivre dans cette direction ? Alors que la bipolarisation de la vie politique est si fortement ancrée dans les mentalités outre-Atlantique, il ne faudrait pas oublier que le système des primaires a broyé un Bernie Sanders, porté par toute une jeunesse, par les minorités, par les pauvres, ceux-là même qui ne se rendaient plus urnes, et qui reprirent avec lui goût aux sciences politiques, à l’humain, au social et surtout au socialisme aux USA. Il sera intéressant de voir la réaction des pro Sanders lorsque viendra la véritable élection.

De même, si la démocratie consiste à demander son avis aux peuples tous les 5ans et à gouverner ensuite sans respecter les promesses de campagne, il faudrait également rappeler (« répéter, c’est enseigner »!) qu’aux Etats-Unis, les présidents ne sont élus que par 25% à 30% des suffrages exprimés, les électeurs ne se déplaçant plus pour élire un gouvernement qu’ils savent oligarchique et le plus souvent,  sans effets notables sur leur quotidien. Aux Etats-Unis, il n’y a plus de plafond aux dépenses électorales, un désastre quand on sait que les financeurs attendent, bien entendu, un retour sonnant et trébuchant de leurs subsides ; le citoyen électeur de devient plus qu’un vulgaire consommateur dont on tente de conditionner le vote.

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Côté Gauche Française, pour la deuxième fois consécutive, le Parti Socialiste va organiser des Primaires qui désigneront son candidat. Pour Alexis Corbière dans Le piège des primaires, celles-ci sont l’«ultime astuce pour verrouiller un système à l’agonie, détournement électoral au profit des deux piliers lézardés de la Vème République qui veulent à tout prix se maintenir au pouvoir, les primaires sont antidémocratiques car elles nient le peuple.».

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S’appuyant sur les études qui ont été faites sur la primaire de 2011 organisée par le PS, Alexis Corbière s’applique à expliquer que la sociologie de ceux qui y participent est très typée et ne représente en rien la réalité profonde du pays. Il s’agit des CSP +, des clientèles des élus locaux et après des retraités. C’est-à-dire ceux qui s’intéressent encore à la vie des partis traditionnels. A l’inverse, les milieux populaires, déjà fortement abstentionnistes lors des élections, ne viennent pas à la primaire. 

Ce processus de désignation a la prétention, par le biais de ce « tamis social », de confier le choix d’un introuvable « candidat unique de la gauche », donc le seul qui aurait le droit de se présenter à la véritable élection, et en creux à disqualifier et interdire ceux qui refuseraient de plier le genou devant lui. « Concrètement au PS, ce stratagème permet d’envisager les conditions d’une nouvelle candidature de François Hollande alors que ce dernier est fortement cabossé dans l’opinion publique, rejeté même. Avec les primaires, l’actuel hôte de l’Elysée peut espérer se représenter, avec en apparence, l’onction d’une forme de nouvelle désignation plus large que son dernier carré de supporters. Finalement, contrairement à l’image qu’elle affiche d’elle-même, cette primaire n’a rien de populaire ni de citoyen, elle fonctionne en réalité au profit d’un appareil affaibli qui tente ainsi de détourner la profonde aspiration populaire au changement. »

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L’une des études les plus affligeantes pour les promoteurs des Primaires est celle qui fut menée sur Montpellier par Julien Audemard et David Gouard, chercheurs en sciences politiques au CEPEL à l’Université de Montpellier. L’étude permet de revenir sur l’angle mort dans la pensée de la gauche française et internationale: la marginalisation majoritaire de la classe populaire. « Au vu de ce que montrent les enquêtes de sociologie électorale menées depuis une vingtaine d’années, on assiste à un déplacement du centre de gravité du noyau dur de la gauche socialiste vers les couches moyennes, intellectuelles et urbaines. La gauche, et le Parti socialiste en particulier, ne parvient guère à contrarier les effets induits des inégalités de politisation qui tiennent à l’écart des urnes les milieux les plus en retrait du champ politique. Plus qu’une sorte de fatalisme sociologique, faut-il y voir la marque d’un certain désintérêt du PS pour ces franges de l’électorat ? ».

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Avec plusieurs camarades de La Nouvelle Gauche Socialiste, dans une tribune Idées intitulée « Mélenchon : le candidat de la raison. » publiée dans le journal Libération, je prévenais du piège de la primaire : «  Certaines voix en appellent à une primaire de toute la gauche pour désigner un candidat susceptible de se «qualifier» pour le second tour afin de faire barrage à l’extrême droite. Nous n’y participerons pas. Pour mobiliser les déçus du quinquennat, ce candidat devrait en effet, au minimum, défendre le programme du Bourget. Or, rien n’est moins sûr. Les expériences de 2007 et 2012 indiquent qu’une primaire, pourtant ultra-médiatisée, ne mobilise que partiellement l’électorat populaire et qu’elle finit par désigner le candidat le mieux placé dans les sondages. Elle musellera pour le reste du débat électoral toutes les forces qui auraient choisi d’y participer dans le but de réorienter la gauche. En participant à cette primaire, ces forces seraient inévitablement perçues comme des forces d’appoint du candidat social-libéral qu’elle aura contribué à légitimer, mais qui aura peu de chance de franchir le premier tour de l’élection présidentielle. »

En conclusion, si l’on pense que le seul vote utile est celui qui correspond à ses convictions et à ses envies, si l’on constate que l’organisation de primaires n’a pour seul but de verrouiller et reconduire les oligarques déjà en place et poursuivre les politiques actuellement menées, si l'on prévoit que les classes populaires et moyennes qui sont celles qui souffrent le plus des lignes austéritaires et libérales ne participerons pas à cette consultation, si l’on refuse de vivre les sempiternelles  reniements et promesses non tenues, si l’on refuse la sondocratie et la démocratie d’opinion… nous ne pouvons que dire « Primaires, piège à cons ! ».

Vivement la VIème République!

Amitiés insoumises,

Laurent Beaud

 

1 juin 2016

La course à l'échalote est lancée!

D’abord promesse électorale, ensuite engagement réitéré à chaque fois qu’il le peut, et enfin condition sine qua none à sa candidature en 2017, l’inversion de la courbe du chômage est devenue le petit caillou dans la chaussure du président-candidat Hollande, tant celle-ci se laisse désirer. Si la parution des chiffres du chômage de ces deux derniers mois semblait dire un léger mieux, l’inversion de la côte de popularité de François Hollande n’a quant à elle pas eu lieue.

 

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Concernant les chiffres du chômage, il y aurait un petit hic ! Selon la direction de la statistique publique qui publie les chiffres, il y a eu une augmentation inhabituelle des sorties des listes de Pôle emploi pour défaut d’actualisation (45,2 % des motifs de sortie contre 44 % lors de précédente publication). Allons bon ! Cette fois-ci, ce n’est pas le système informatique de Pôle Emploi qui a connu un bug incongru à la fin du mois. Faudrait-il comprendre que les demandeurs d’emploi ont définitivement compris que ce n’était plus ici qu’il fallait s’adresser pour trouver du travail ? Ou que les beaux jours d’avril ont fait oublier à ces derniers de s’actualiser ? Gare ! Le mois de mai et ses trop nombreux jours fériés – rappelons-le, ils « un frein à la croissance et à l’emploi » selon le Medef, Sic – risque de faire des dégâts à moins que la météo maussade ait convaincu les égarés de répondre à la rigueur bureaucratique, contredisant l’embellie « officielle », ou a définitivement comprendre que la statistique d’aujourd’hui ne reflète plus, ne sait plus mesurer, la réalité des difficultés vécues par les français !

 

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Bref, pour le candidat Hollande « ça va mieux ! », et il ne cesse de le répéter à qui veut l’entendre. Dans un entretien accordé ce mardi au journal Sud Ouest, il se félicite encore : « Aujourd'hui, la croissance repart à un rythme encore plus élevé que prévu. L'investissement redémarre et la consommation progresse » avant d’y aller de son « ça va mieux ». Apparemment, les français ne partagent pas l'optimisme du président sur la situation économique et sociale. Selon un sondage OpinionWay, 73% des personnes interrogées ne perçoivent aucune amélioration dans le domaine de l'emploi ou de la croissance depuis son arrivée au château.

La question philosophique de fond, qu’il faudrait se poser, serait de savoir c’est que si « ça va mieux » alors pourquoi un président, se prétendant socialiste, insiste tant dans la direction de cette « Loi Travail » ? Et c’est peu de dire que la méthode choisie ne correspond ni aux attentes et/ou besoins des concernés, ni aux logiciels économiques d’une politique de gauche. Mais alors pourquoi s’entêter à s’accrocher à une martingale lorsque l’on ne se donne aucunement les moyens de rallumer les étoiles des plus miséreux ? 

Plusieurs pistes pour tenter de résoudre l’énigme ou d’éclairer notre lanterne sur ce sujet : L’Europe pilote tout à distance, elle a déjà prévu le scénario et impose son diktat « austéritaire » pour que la France rentre dans les clous des traités qu’elle a signé – dont le fameux « Merkozy » que le « Moi Président » avait promis de renégocier … et qu’il a signé sans qu’aucune virgule ne soit supprimé ! – car il faut bien promouvoir l'ordre concurrentiel et la dérégulation; Le président a décidé de consommer sa « lune de miel » avec le patronat en transposant dans la loi l’intégralité des propositions du cahier de revendications du Medef, histoire de transformer les paroles en actes concernant ses idées ordo-libérales; François Hollande a décidé de mettre en œuvre la politique qu’il a finalement toujours défendu… Comme nous l’avions vu dans Prélude du Social-libéralisme en austérité majeure! Le socialisme se meurt, vive le social-libéralisme!: « Dès 1991 dans L’heure des choix, pour une économie politique, publié chez Odile Jacob (et coécrit avec Pierre Moscovici), Hollande avait tenté de démontrer « que la gauche, comme la droite, était capable d’être bonne gestionnaire », le tout en se félicitant de « la politique de rigueur menée par François Mitterrand à partir de 1983 : inflation maîtrisée, coûts salariaux retenus, allégements fiscaux substantiels pour les entreprises.» oubliant au passage les deux premiers piliers du triptyque !; Ou peut-être que finalement, il ne s’agit que d’une stratégie électorale pour éliminer la concurrence à sa gauche et à sa droite, en vue de 2017 en créant le trouble tant au niveau des identités idéologiques des différentes formations traditionnelles qui composent le paysage politique français, qu’au niveau du message que pourrait transmettre l’un-e de ses concurrent-e-s au sein même du Parti Socialiste.

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Présidentielles 2017 : les impétrants et les impétueux se révoltent ! 

Selon Ménandre, il paraît que « Les mauvaises compagnies corrompent les bonnes mœurs. » et qu’il  ne faut jamais dire à ses amis ses pensées les plus secrètes pour ne pas craindre qu’ils deviennent tes ennemis. Alors quoi de neuf dans le marigot ? Dans cette France où quand le roi est mort, on crie « Vive le roi », plusieurs personnalités laissent transpirer leurs désirs d’incarner Brutus : « Vertu, tu n’es qu’un nom ! »

Tout d’abord, il faut suivre Arnaud « Zeus » Montebourg, dans son ascension du Mont Beuvray! L’ancien ministre de l’économie – qui soit dit en passant a mis le ver dans la pomme ! – ne cache plus ses envies, même si pour l’heure il ne s’avance pas trop en matière de programme. Force est de constater qu’il finirait par être, comme Atlas, écrasé par le poids du Monde. Il ne faut jamais dire jamais, mais monter un Meuble en kit ou redécorer sa baraque, c’est toujours un peu compliqué ! Mieux vaut avoir un architecte d’intérieur ! 

 

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Nous avons ensuite « Mister 49:3 », le premier ministre Manuel Valls qui dégaine plus vite que son ombre. Lucky Luke a du souci à se faire ! Après son échec aux primaires de 2012 – pour rappel 5% - et sa nomination comme premier ministre, il se voit cantonner au rôle constitutionnel prévu à son égard, soit de diriger «  l’action du Gouvernement (art. 21) et de fixer ses orientations politiques essentielles qui, hors cohabitation, sont celles du président de la République. ». Dans un premier temps, il a cru qu’il pouvait être le Tony Blair français, mais désormais il a vite compris qu’en se trompant entre autorité et autoritarisme, tout était cuit pour lui : Vider son Parti, Check ! En prendre les commandes, Out ! Si lors du congrès de Poitiers, il s’est permis d’aller voir la finale de la  ligue des champions de Football pour soutenir de FC Barcelone. Cette année la finale se jouait entre madrilènes, et il n’y aura aucun espoir pour qu’un club catalan soulève le trophée cette année !

 

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Enfin, vint le trublion, que l’on dénommera « Marie Antoinette » Macron. Il a cru qu’avec sa mèche sur le coté, et sa bouille, qu’il pouvait surfer sur la vague. Le jeune loup de mer a oublié qu’à force de Mac(a)ronades, il finirait par couler ! Désolé pour les « fotes » d’orthographe, de syntaxe ou de conjugaison qui s’introduiraient dans cet article de Blog, mais je n’ai pas eu le temps de me faire corriger par mes amies de GAD. Vendredi dernier, après une séance photo digne d’un Sarkozy agrippé à la  crinière de son poney camarguais – franchement, les spins doctors à la française ne sont plus ce qu’ils étaient ! – celui qui n’a même pas besoin de se raser pour en rêver, nous gratifiait d’une nouvelle bafouille sur la mode française et les jeunes : " Vous n'allez pas me faire pleurer avec votre tee-shirt, la meilleure façon de se payer un costard c'est de travailler. Se Flutuat Nec Mergitur ! comme disait le sétois – et tout le monde ne rêve pas d’être milliardaire. Jeanne d’arc n’est jamais descendu aussi bas dans l’hexagone, et le petit Manu n’est que peu entouré.

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Les #insoumis se refusent à faire des choix aussi dantesques ! Si Danton avait raison : « est-ce qu’on emporte pas la patrie à la semelle de ses souliers ? ». Ils sont prêts à ruer dans les brancards lorsque on les provoque.

La fin justifierait finalement les moyens !

Le problème, c’est que la voie choisie par François Hollande n’est qu’une posture stratégique « exclusive » se référant à la méthode de l’autre « François Président », et cela a ses limites aujourd’hui. Tel François Mitterrand qui avait changé de premier ministre, et remanié à tour de bras, pour éliminer les impétueux les uns après les autres, François Hollande est de plus en plus tenté, par exemple, de remplacer un Manuel Valls, mal en point en terme de popularité, par un Emmanuel Macron, insolent et gaffeur, qui ne cesse d’agacer avec ses dérapages verbaux, histoire de tuer les deux. Sur le plan du vrai sujet, celui de la lutte contre le chômage, circulez, il n’y a rien à voir ! Les loups sont sortis du bois, le fond reste désespérément absent des débats !

Et puisque pour Beaumarchais « il vaut mieux se dépêcher d’en rire, de peur d’en avoir à en pleurer », nous constaterons que tout cela n’est que tartufferie et qu’aucun projet alternatif n’est proposé par un PS qui ne peut échapper à son destin ! Vivement une VIème République et une constituante ! Préférons les idées claires aux eaux troubles !

Amitiés « socialistes »,

Laurent Beaud

 

5 avril 2016

Pour confisquer la démocratie, le changement des règles c’est maintenant !

Fin mars, une poignée de députés ont décidé, en catimini, que le scrutin majeur de la cinquième république – soit l’élection présidentielle – devait être « réformé».

En effet, Bruno Le Roux et dix de ses collègues parlementaires, sur un coin de table, ont proposé une loi à la représentation nationale, modestement intitulée « modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle », visant à réduire le nombre de « petites » candidatures, leurs expressions publiques et médiatiques et l’égalité des temps de paroles – pour ne pas dire la substance des débats essentiels qu’il convient de traiter devant les citoyennes lors de cette échéance.

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Certes, beaucoup de voix se sont levées ces dernières années pour dénoncer une constitution imparfaite et appeler à de nouveaux modes de fonctionnements des institutions françaises, mais il ne pourrait être possible de modifier en dernière minute les règles, de confisquer à ce point ce qui fait sens dans notre démocratie contemporaine, soit l’égalité et la liberté d’expression au sein d’un débat national, sous prétexte que pour ne pas entendre ce qui est désagréable, les gueux ne puissent pas s’exprimer.

C’est ce mardi 5 avril 2016 que la loi de « modernisation » de l’élection présidentielle est examinée…

En tant que petite formation politique prônant un projet alternatif économique hétérodoxe « socialiste » et l’horizontalité des rapports humains dans la société, la Nouvelle Gauche Socialiste refuse que la démocratie soit confisquée par une oligarchie et désapprouve cette proposition de loi.

La dernière décennie fut difficile pour nos concitoyen-ne-s, et l’élection de François Hollande fut un grand soulagement après tant de distorsions et d’oppositions entre les français(e)s, créées et nourries par la politique de Nicolas Sarkozy, et par sa façon de placer l’individualisme au cœur des débats. Les citoyen-ne-s avaient une grande attente et ont exprimé en 2012 « Un changement immédiat profond », que leur avait promis le candidat Hollande.

Depuis l’accession à la présidence de la république de François Hollande, les résultats (ou l’absence de résultats) des politiques économiques et sociales menées par un gouvernement d’obédience ordo-libérale ont forcé le citoyen à sanctionner dans les urnes (ou à s’abstenir) le cap inopérant choisi par l’exécutif. Les sévères défaites aux élections dites « intermédiaires » furent une succession de désaveux cinglants pour le gouvernement et pour le Parti socialiste qui l’a soutenu sans réserve. Faisant des scrutins un moyen d’expression, l’électorat de gauche a condamné sans équivoque cette politique, dans laquelle il est impossible de retrouver le souffle du discours du Bourget ou l’ambition des 60 propositions du candidat Hollande.

La réalité, c’est que c’est bien l’accroissement du chômage, l’augmentation des impôts, l’érosion du pouvoir d’achat, la remise en cause des « acquis sociaux », la hausse des déficits et l’apparition de 900.000 nouveaux pauvres – l’ensemble des renoncements de ce quinquennat – sont les sources de la crispation et du mécontentement des français… et non les règles de l’organisation de l’élection.

L’ampleur stupéfiante des défaites du PS est révélatrice de l’incompréhension entre les citoyens, les élus locaux et les dirigeants de notre pays. Ces derniers, et François Hollande lui-même l’a admis, n’ont pas pris la pleine mesure de la crise économique, du chômage et de la précarité frappant huit millions de français qui ne voient aucune perspective de redressement. Il s’agit d’une véritable coupure avec une base populaire qui ne s’y retrouve pas.

Perdant sa capacité à dominer culturellement dans notre société, la gauche, dans son ensemble, entrainée par de pseudos socialistes, a perdu progressivement sa capacité à être hégémonique. Cela s’est traduit par le développement des idées conservatrices dans l’opinion publique, mais aussi par la montée progressive et continue des logiques anti-démocratiques : hausse de l’abstention, détestation des élus, part grandissante du populisme dans les paroles publiques, montée des votes extrêmes…

Pour autant, les initiatives et les manifestations autour de la loi El Khomri, dite loi « Travail », démontrent que les français ne se désintéressent pas de la chose publique et que le peuple attend une politique de gauche sortant du carcan, des appareils des grands partis. Pour ne citer qu’un exemple, le mouvement « Nuit Debout », par le débat qu’il propose au sein de ses occupations, ne cesse d’appeler à la construction d’un militantisme politique citoyen et inventif et d’exprimer sa volonté de voter pour des candidatures « hors système ».

Nous sommes d’accord ! Car seuls les projets allant dans le sens de l’intérêt général et portés par un ensemble conséquent, sont voués à la réussite. Pour la Nouvelle Gauche socialiste, il est indéniable que la seule direction possible est celle de la coopération, celle de la citoyenneté active pour redonner un sens à l’action politique et à la démocratie.

Alors qu’il faut savoir écouter, mais surtout entendre, le peuple ne se sent pas entendu et les gouvernants sortants adoptent un stratagème scabreux pour ne pas avoir d’oreilles.

La proposition de loi dite de modernisation de l’élection présidentielle n’a pour but que de rendre beaucoup plus difficile les candidatures dites indépendantes :

1/ Le texte vise à rendre publiques toutes les signatures des élus alors que jusqu’à présent elles étaient tirées au sort, soi-disant dans un but de transparence, en réalité, pour mettre une pression supplémentaire sur les élus suffisamment courageux pour avoir osé braver les interdits et donné un parrainage à un candidat indépendant.

2/ La proposition rend plus difficile l’obtention des 500 signatures de parrainage. Les élus devront dorénavant transmettre eux-mêmes leur parrainage au Conseil Constitutionnel alors que, jusqu’à présent, ils le remettaient au candidat ou à ses représentantsUn maire pourra ainsi vous promettre de vous donner sa signature et ne pas le faire.

3/ La proposition de loi vise aussi à limiter à 15 jours le temps d’égalité de parole (en lieu et place de 5 semaines). La règle d’égalité stricte sera remplacée par un « principe d’équité », fondée sur « la représentativité de chaque candidat » et sa « contribution à l’animation du débat électoral ». La règle d’égalité stricte sera réservée aux deux dernières semaines avant l’élection.

4/ Réduction à 6 mois, au lieu de 12, de la période durant laquelle sont comptabilisées les recettes et les dépenses électorales figurant dans les comptes de campagne des candidat(e)s. Conséquence : les élu(e)s sortant(e)s pourront, jusqu’à 6 mois avant le début de la campagne, utiliser des moyens publics pour faire leur publicité.

Alors non, tout cela n’est pas possible car la démocratie c’est le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple… il n’est pas possible de pré sélectionner, de bâillonner et de décider en douce.

Vivement une constituante ! Non à cette proposition de loi !

Laurent Beaud

23 mars 2016

Jean-Luc Mélenchon : le candidat de la Raison

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Libération, 23 mars 2016

Anciens cadres nationaux et fédéraux du PS, aujourd’hui membres de la Nouvelle Gauche Socialiste, nous avons quitté le parti d’Epinay, en crise profonde, et comptons parmi les déçus du quinquennat de François Hollande.

Le bilan décevant du quinquennat

La loi bancaire devait être proclamée pour arraisonner la finance. Elle fut en deçà des recommandations du rapport Liikanen en faveur d’une directive bancaire européenne. La France ne pressa d’ailleurs aucunement son représentant en charge du dossier à la Commission européenne d’en achever l’élaboration. La taxation des transactions financière, qui devait être mise sur pieds en coopération renforcée, ne fait toujours pas l’objet d’un appui ferme de l’exécutif.

La réforme fiscale a été enterrée. Bercy s’est-il arrangé avec le Conseil constitutionnel pour « retoquer » le projet de CSG progressive défendu par les « frondeurs » ? Ce dernier n’en répondait pas moins points par points aux objections faites en 1999 au Premier ministre de l’époque, dépositaire du projet et aujourd’hui membre du conseil des « sages ».

La lutte contre le chômage est en passe d’échouer, alors que la Commission et le Conseil ont autorisé la France à déroger au pacte de stabilité pendant toute la durée du mandat. Ces importantes marges de manœuvre ont été affectées en pure perte au redressement de la part des profits dans la richesse nationale. Leur octroi auraient pu être conditionné à de l’investissement utile. Elles auraient encore pu être consacrées à la transition énergétique, aux services publics et à la redistribution.

Enfin, la loi Travail et la réforme constitutionnelle sont aussi symptomatiques du virage conservateur de l’exécutif, qu’inaptes à inverser la courbe du chômage et à lutter contre le terrorisme. Elles affaibliront inévitablement le salariat et la démocratie.

Le piège de la Primaire

Certaines voix en appellent à une Primaire de toute la gauche pour désigner un candidat susceptible de se « qualifier » pour le second tour afin de faire barrage à l’extrême-droite. Nous n’y participerons pas. Pour mobiliser les déçus du quinquennat, ce candidat devrait en effet, au minimum, défendre le programme du Bourget. Or rien n’est moins sûr. Les expériences de 2007 et 2012 indiquent que des Primaires, pourtant ultra-médiatisées, ne mobilisent que partiellement l’électorat populaire et qu’elles finissent par désigner le candidat le mieux placé dans les sondages. Elles musèleront pour le reste du débat électoral toutes les forces qui auraient choisi d’y participer dans le but de réorienter la gauche. En participant à cette primaire, celles-ci seraient inévitablement perçues comme les forces d’appoint du candidat social-libéral qu’elles auront contribué à légitimer, mais qui aura peu de chance de franchir le premier tour de l’élection présidentielle.

Seule une candidature « hors système », c’est-à-dire dépassant les frontières et jeux des « appareils » existants, est de nature à enclencher une nouvelle dynamique populaire susceptible d’atteindre à un score proche ou égal au seuil de qualification pour le second tour. Son espace politique, au carrefour de la République, du socialisme et de la planification écologique est, à l’évidence, identifiable. 

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Le candidat de la Raison

Plusieurs personnalités pensent que leur tour est venu pour incarner un tel destin. Les traits de caractère sont parfois mis en avant pour comparer les impétrants. Personne n’a, à cet égard, le monopole de la passion et de la grandiloquence, ni de l’égocentricité et de l’autoritarisme. A l’aune de ces critères, nombre de prétendant(e)s susceptibles de faire le choix de s’enfermer dans le piège de la primaire sont relativement bien classés. Pour les progressistes, seule la Raison doit guider l’action et considérer les personnalités qui, par le symbole de leurs engagements, sont aujourd’hui en position d’incarner l’espoir d’une Résistance au mouvement de balancier vers la droite, en passe d’emporter notre pays.

C’est pourquoi nous apportons notre soutien à la proposition de candidature faite par Jean-Luc Mélenchon, la mieux placée pour incarner, auprès de ceux qui souffrent, la France insoumise à l’ordre établi. L’élection présidentielle est l’élection majeure à l’occasion de laquelle de nouvelles générations de citoyens s’engagent collectivement en politique, pour peu qu’une perspective s’ouvre. Elle est l’occasion d’expérimenter de nouvelles pratiques susceptibles de jeter les bases d’un futur rassemblement citoyen à la française. Le moment est venu d’en bâtir les fondations.

par : Liêm Hoang-Ngoc (ex-membre du Bureau national du PS), Julien Jusforgues (ex-membre du Conseil National), Daniel Bonnot (ex-membre de la Commission nationale des conflits), Roger Tropéano (ex-Délégué national), Catherine Renaud-Mayer (ex-Première secrétaire fédérale de la Manche), Laurent Beaud (ex-membre du Bureau fédéral de l’Hérault), Alain Bourgeade (ex-membre du Bureau fédéral de Haute-Garonne), Jean-Claude Bridon (ex-membre du Bureau fédéral du Cher), Fabienne Chiche (ex-membre du Bureau fédéral du Val de Marne), Annie Darrieux (ex-membre du Bureau fédéral du Gers), Sabrina Ghallal (ex-membre du Bureau fédéral de la Marne), Denis Gouteux (ex-membre du Bureau fédéral du Cantal), Nicolas Grondin (ex-membre du Bureau fédéral de l’Essonne), Laurent Hecquet (ex-membre du Bureau fédéral du Puy de Dôme), Catherine Laur (ex-membre du Bureau fédéral de l’Aveyron), Frédéric Martin-Delvincourt (ex-membre du Bureau fédéral des adhésions de Paris), Jean-Claude Maurin (ex-membre du Bureau fédéral du Gard), Anas Moutabarrik (ex-membre du Bureau fédéral de la Marne), Daniel Orts (ex-membre du Conseil fédéral de l’Aveyron), Franck Rey (ex-membre du Bureau fédéral du Cantal), Philippe Serre (ex-membre du Bureau fédéral de l’Isère), Olivier Spinelli (ex-membre du Bureau fédéral de la Somme)

Retrouvez NGS sur : http://ngs.ouvaton.org

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11 décembre 2015

Voter, c'est résister. Résister, c'est voter!

Il n’y a pas si longtemps que cela, Stéphane Hessel, dans Indignez-vous !, rappelait : « Non, cette menace [la barbarie fasciste] n'a pas totalement disparu. Aussi, appelons-nous toujours à "une véritable insurrection pacifiste" contre les moyens de communication de masse qui ne proposent comme horizon pour notre jeunesse que la consommation de masse, le mépris des plus faibles et de la culture, l'amnésie généralisée et la compétition à outrance de tous contre tous. A ceux et à celles qui feront le XXIe siècle, nous disons avec notre affection : Créer, c'est résister. Résister, c'est créer. ».

Le temps s’est obscurcit sur la France. Les brumes brunes et le vol noir des corbeaux menacent plus que jamais d’envahir la plaine !

Cette année, la COP21 se tient sur un Paris endeuillé, et le climat général s’est refroidit autant que l’amer monte. Un texte d’engagement clair et ambitieux tarde à sortir ; et plus le temps avance, plus ce dernier tend à se réduire à peau de chagrin. 

J’ai eu l’honneur de partager le dernier combat politique de Stéphane Hessel, en appelant à Oser, Plus loin, Plus vite ! et à recouvrer un paradigme écosocialiste pour la gauche. Mais voilà, jamais les mots de l’homme lumineux n’ont été si empreints de vérité. En effet, une horde de tueurs ont semé la terreur sur la capitale – et entre nous, c’est bien cela le terrorisme ! -, leurs exactions ont été relayé massivement et continuellement par les télévisions d’information 24h/24 entrainant par rebond la montée inéluctable de la haine et du repli sur soi, que porte dans son ADN le Front National ; l’Etat a choisit de pérenniser un état d’urgence « sécuritaire» pour faire face aux illuminés extrémistes de l’EI, oubliant au passage qu’il n’avait pas su décréter ce même état d’urgence pour lutter contre les inégalités, le fléau du chômage ou sauver le climat, et alors même que les situations sont tout autant alarmantes pour l’humanité.

« Le chaos, c’est quand le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres » avait écrit Antonio Gramsci au fin fond de sa geôle ; le procureur fasciste qui avait tranché sur son sort déclarant « Nous devons empêcher ce cerveau de fonctionner pendant vingt ans ».

A la veille des élections régionales, dans une tribune, Jean Ortiz explicitait le danger de ne plus réfléchir, de ne plus s’exprimer : « La peste brune est toujours le fruit pourri du capitalisme en crise (…) il n’y a pas de fascisme « à visage humain » ! Lorsque la crise brouille les repères, provoque une abyssale crise des valeurs, un rejet viscéral de la politique politicienne, voire de la politique tout court et des « politiques » (« on a tout essayé »), jouer avec de la dynamite peut provoquer une déflagration civilisationnelle. La responsabilité écrasante de cette situation noire, très noire, très dangereuse, de ces relents des années 1930 et 1940, incombe fondamentalement aux partis de l’alternance, aux petits soldats du néo-social-ultra-libéralisme. L’histoire nous a appris qu’ils choisissent ou finissent tous par opter pour la gestion enthousiaste, naturelle, brutale ou soft, « loyale », du capitalisme. (…)Politisons l’alternative, indiquons clairement le cap (socialisme, « écosocialisme », etc.), réinvestissons le rêve, l’utopie, le langage des luttes et la lutte des classes, le débat idéologique, ne lâchons pas (par suivisme ou volonté d’adaptation) sur nos valeurs, pour que revienne le plaisir de militer. Recréons du lien par des pratiques plus ouvertes, plus horizontales… (…)Travaillons à un très large front social, à une structuration souple de cette indispensable Unité Populaire. La reconquête sera longue, multiforme, douloureuse, patiente, argumentée… La montée de la « peste brune » n’est pas INELUCTABLE ! NO PASARÁN ! Si nous faisons ce qu’il faut. Dans l’immédiat : Aux urnes dimanche ! »

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Car oui, les françaises et les français sont appelés à voter pour faire vivre ou survivre la démocratie ce dimanche, et paradoxalement la menace grandit de voir l’extrême droite s’imposer ici ou là alors que ses idéologies rêvent de l’éliminer. Cela fait déjà un moment que le silence des urnes a remplacé les cris de colères de la rue. Cette abstention massive corrélée à la défiance du politique, mais aussi à l’anxiété, aux frustrations sociales peut faire surgir « les fameux monstres », Adolph Hitler n’avait t’il pas été élu avec un programme «  nationalsozialistisch » soit national- socialiste ?

"Là où il y a une volonté, il y a un chemin" disait Lénine. Mais quel chemin ?

Avec la Nouvelle Gauche Socialiste, nous le disons simplement, il faut lever les loups. Le FN est national-capitaliste, nous sommes écosocialistes et internationalistes.

Dans Écosocialisme : L’alternative radicale à la catastrophe écologique capitaliste, Michael Lowy a parfaitement définit le modèle de développement qui est la seule alternative au libéralisme, et par voie de fait à cette montée extrémiste : « L'écosocialisme est un courant politique fondé sur une constatation essentielle : la sauvegarde des équilibres écologiques de la planète, la préservation d'un environnement favorable aux espèces vivantes - y compris la notre- sont incompatibles avec la logique expansive et destructrice du système capitaliste. Seule une prise en charge collective et démocratique permettrait à la fois de répondre aux besoins sociaux réels, de réduire le temps de travail, de supprimer les productions inutiles et nuisibles, de remplacer les énergies fossiles par le solaire. Ce qui implique une incursion profonde dans le régime de la propriété capitaliste, une extension radicale du secteur public et de la gratuité, bref un plan écosocialiste cohérent ».

Ce modèle est celui que nous voulons mettre en œuvre ! La cure d'austérité infligée en France ne marchera jamais. L’on n’améliore pas un modèle économique et social en réduisant ses marges de manœuvre ; si l’on veut transformer, atteindre la rupture et créer un nouveau modèle de développement économique, socialement et écologiquement  responsables, il faut se donner les moyens de sa mise en route.

La Revue ecorev' dans son numéro automne-hiver 2008, avait accordé un entretien avec André Gorz pour repenser le travail : « La décroissance est donc un impératif de survie. Mais elle suppose une autre économie, un autre style de vie, une autre civilisation, d'autres rapports sociaux. (..) La sortie du capitalisme a déjà commencé sans être encore voulue consciemment. La question porte seulement sur la forme qu'elle va prendre et la cadence à laquelle elle va s'opérer. ».

Pour la région Languedoc-Roussillon / Midi-Pyrénées, et à l’occasion de ses élections régionales, avec une liste de large rassemblement intitulée Nouveau Monde en commun, nous avons ouvert le champs des possibilités pour faire des utopies d’hier, les réalités d’aujourd’hui !

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Citoyen, entends-tu les cris sourds du pays qu´on enchaîne?

Ohé, partisans, ouvriers et paysans, c´est l´alarme.

Dimanche, allez voter ! Le pouvoir c’est vous qui l’avez, ne vous le laisser pas confisquer ! Voter, c'est résister. Résister, c'est voter!

Fraternellement,

Laurent Beaud

P.S. Citoyens sudistes, ce dimanche choisissez Notre Sud en Commun* pour écarter les monstres!

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* Liste Fusionnée des listes Notre Sud portée par Carole Delga et Nouveau Monde en commun portée par Gérard Onesta.

20 octobre 2015

Faites attention, ça va exploser!

Halte à la supercherie ! Oui, disons-le clairement : les citoyen-e-s de ce pays ne croient plus aux faux-semblants, aux belles paroles de bonimenteurs, aux promesses non tenues. Depuis quelques décennies déjà, notre modèle démocratique est mis à mal. Non pas par les populistes qui ne font que cultiver les angoisses et les peurs pour mettre en place leurs funestes stratégies électoralistes, mais bien par la tromperie de certains politiciens qui consiste à tout promettre et à rarement mettre en œuvre.

S’il est un constat qui reste indéniable, c’est bien que la République que nous connaissons est à bout de souffle. S’il est sans doute vrai que les institutions sont à revoir dans leurs ensembles, le contenu – qui est à tort ou à raison dénommé pacte républicain – ne peut plus rester systématiquement déconnecté des réalités économiques et sociales de ce pays.

La hausse constante de l’abstentionnisme -  résultante de cette incapacité à convertir des paroles en actes – n’est que l’annonce avant-gardiste d’une colère sourde et profonde qui risque fort de se transformer en révolte. Le poids des mots étant important, je vous accorderai que je préférerai à la révolte la révolution.

En effet, la révolution est le bouleversement brusque et général d’un régime politique, social en vue de reconstituer la société sur des principes nouveaux opposés à celui du régime renversé, de substituer un ordre nouveau à l’ordre ancien. Elle se distingue de la révolte, qui est le plus souvent sans programme et qui n’a pas de substitut positif de remplacement, par son organisation, sa visée et la réalisation d’institutions nouvelles ; elle engendre de nouvelles structures sociales et un changement plus ou moins radical des valeurs fondamentales de la civilisation. Et Jean Jaurès déclarait « Il ne peut y avoir de révolution que là où il y a conscience » ! Alors oui soyons plus que révoltés, soyons conscients, soyons révolutionnaires !

Le point de rupture est t’il déjà atteint ?

Dans Choses vues, Victor Hugo affirmait : « Les grandes révolutions naissent des petites misères comme les grands fleuves des petits ruisseaux. » Et si pour la chemise d’un DRH, Valls et Macron avaient gratté l’allumette de trop afin d’incendier les derniers chiffons rouges français. En effet, comment considérer l’attitude d’un gouvernement -  se prétendant le cœur à gauche – qui vise à conforter une direction s’apprêtant à licencier près de 3000 salariés, et ce sans aucun mea-culpa quant aux mauvais choix réalisés dans sa gestion, tout en s’acharnant sur des syndicalistes qui pris de mauvais sang ont cisaillé la chemise de celui sensé annoncé la bonne nouvelle.

Pour moi, il s’agit quelque part des risques du métier. Si un ouvrier du BTP se pète la gueule du troisième étage du chantier, c’est un accident du travail dû aux risques du métier ! Alors pourquoi finalement, ne pas considérer qu’un DRH qui se fait malmener parce qu’il va flinguer des familles, cela ne fait pas parti des risques de son job. Si l’on peut considérer que le premier n’a pas vraiment choisi son destin, ce n’est que rarement le cas du second !

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A vrai dire, il est à concevoir que la trahison poursuit son chemin sournois en raison de la mise en place permanente d’une politique en direction des revendications patronales et des diktats de la troïka. Vive l’austérité et halte aux semeurs de troubles ! Et pendant ce temps là, circulez il n’y a rien à voir, vous n’êtes pas invités ! Entre honte et mépris, l’exemple d’Air France lève au grand jour la saleté des décisions prises en petit comité où le fusillé n’est pas convié à son procès. Alors trop facile pour les grands de se plaindre et d’abraser au passage le monde salarial et syndical, le petit peuple tout en le rendant responsable de la noirceur de la situation dans laquelle il se trouve plongé.

Dans Discours de la servitude volontaire, La Boëtie n’a fait que faire le même constat : « Il y a trois sortes de tyrans. Les uns règnent par l’élection du peuple, les autres par la force des armes, les derniers par succession (...) s'ils arrivent au trône par des moyens divers, leur manière de régner est toujours à peu près la même. Ceux qui sont élus par le peuple le traitent comme un taureau à dompter, les conquérants comme leur proie, les successeurs comme un troupeau d'esclaves qui leur appartient par nature. (…) Les tyrans sont grands que parce que nous sommes à genoux : levons-nous ! »

Le problème avec les gouvernances successives, qu’elles soient libérales ou sociales-libérales, c’est qu’elles sont tout simplement libérales. Et n’en déplaise à Sire Macron (nous l’appellerons ainsi en raison de ses déclarations d’amour envers la monarchie) lorsqu’il déclare « le libéralisme est une valeur de gauche », la liberté ou la lutte pour l’émancipation, ce n’est pas le libéralisme qui aliène le travail des uns aux profits des autres, c’est le sens matérialiste de l’histoire de celles et ceux qui ont sué. Révisez vos classiques, Sire! A celles et ceux qui pensent que les décisions doivent être prises telles des opérations tapées sur les touches d’une calculatrice, et qui se contrefichent de aspect humain et social des réalités, je leur rétorque que les sans-dents ne pourront jamais être condescendants à la misère que le capitalisme et le patronat leur promettent.

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Rosa Luxemburg a raison lorsqu’elle dit dans Réforme sociale ou révolution ?: « Quiconque se prononce en faveur de la voie des réformes légales, au lieu et à l'encontre de la conquête du pouvoir politique et de la révolution sociale, ne choisit pas en réalité une voie plus tranquille, plus sûre et plus lente, conduisant au même but, mais un but différent, à savoir, au lieu de l'instauration d'une société nouvelle, des modifications purement superficielles de l'ancienne société (…) non pas la suppression du salariat, mais le dosage en plus ou en moins de l'exploitation. »

En 2012, dans son discours du Bourget, le candidat Hollande tançait « Mon ennemi, c’est la finance ! Dans cette bataille qui s’engage, je vais vous dire qui est mon adversaire, mon véritable adversaire. Il n’a pas de nom, pas de visage, pas de parti, il ne présentera jamais sa candidature, il ne sera donc pas élu, et pourtant il gouverne. Cet adversaire, c’est le monde de la finance. (..) Ainsi, la finance s’est affranchie de toute règle, de toute morale, de tout contrôle.... ». Le fin mot de l’histoire, nous le connaissons désormais. Il ne s’agit que d’une suite de reniements à des engagements qui ne seront jamais tenus : de la grande réforme fiscale à la séparation des activités bancaires, de la résolution de crise de la dette à la renégociation des traités européens, en passant par la lutte contre la fraude fiscale. La politique menée n’est point le changement promis, mais la continuité d’un modèle économique en bout de course. Il a dit que la finance est son ennemi, mais les dividendes des actionnaires ont augmenté de 60% en 5 ans; il voulait faire des la jeunesse une priorité mais les jeunes vivent plus mal que leurs parents. 

Tel Karl Marx et sa formule « les prolétaires n’ont plus rien à perdre que leurs chaines. Ils ont un monde à gagner », le monde du travail, la France de la précarité et des inégalités, d’aujourd’hui a de moins en moins à perdre. Il est difficile de ne point entendre la colère liée à la contradiction entre le dire et le faire. La litanie antisociale distillée par ce quinquennat est sans fin. Plutôt que de mettre en place un véritable plan de lutte contre le chômage, nous avons droit à un lame de fond visant à préserver le capital et ses rentes au détriment des conquis sociaux et des protections salariales. La place n’est plus aux pragmatiques, ni aux réalistes, elle est maintenant celle des audacieux.

Le fameux dialogue social vendu comme clé de voute du Hollandisme a du plomb dans l’aile. Peut-être que pour une chemise –mais peut-être pas seulement - la rupture est consommée entre les classes populaires et moyennes, le syndicalisme ouvrier, ce gouvernement et le Parti Socialiste qui le soutient tel le mouton suit le berger qui va le mener à l’abattoir. En sens des responsabilités et en respect pour notre démocratie, plutôt que de faire organiser un simulacre de référendum - aux buts populistes et électoralistes - par Monsieur Cambadélis, il aurait mieux valu que le président de la république invite les françaises et les français à se prononcer sur sa politique économique et sur le volet social de celle-ci.

La vérité est que François Hollande est le représentant ultime d'une génération politique fascinée par Mitterrand – il ne s’en cache point d’ailleurs - et qui, sans avoir ni sa finesse, ni sa culture, a confondu le cynisme et le talent, désappris tout ce qui ressemblait à de la loyauté, du courage, de la profondeur et en est renduite aux déclarations d'estrades, au serment de canton, aux complots d'arrière-boutiques. Un machiavélisme middle-class.

Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT, l’a bien compris, et après avoir refuser de porter l’estocade sur la réformes des retraites complémentaires – pour rappel il s’agit de sous revaloriser les pensions, d’allonger de faits encore les durées de cotisations…-  il annonce qu’il boycottera la conférence sociale. Les derniers miasmes du syndicalisme ouvrier (malheureusement il faut bien le voir ainsi) refuseront de participer à une énième opération de communication au service du gouvernement, déplorant que les sujets majeurs ne sont pas pris en compte, comme le temps de travail et les salaires…

« Faites attention, ça va exploser ! »

La main de François Hollande refusé par un métallo, un militant qui jette un yaourt sur Macron, une autre qui l’accuse d’assassiner les chômeurs… La tension monte. Dans un entretien au Journal du Dimanche,  Philippe Martinez s'en prend directement à Manuel Valls à qui il reproche son attitude dans le dossier Air France. « Depuis ces événements, le Premier ministre s'entête à ignorer les salariés. Pas un mot pour les 3.000 futurs licenciés. Pas un mot après que cinq salariés ont été réveillés par la police devant leur famille et gardés à vue plus de trente-six heures comme des malfrats de la pire espèce ». Au passage, même Cahuzac ou Thévenoud n’ont pas eu droit au zèle des services de police.

Le syndicaliste assure avoir prévenu le gouvernement que l'exaspération des salariés allait croissant. Aux ministres, « on leur dit : 'Faites attention, ça va exploser'. Ils nous répondent de calmer les salariés mais on n'est pas les pompiers de service, on n'est pas là pour réparer les bêtises du patronat ou du gouvernement (…) quand on n'est jamais écoutés, qu'on risque de perdre son boulot et qu'il y a six millions de chômeurs, on ne va pas prendre ça avec le sourire ».

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Alors non ! Non, nous ne sourions pas ! Nous revendiquons la révolution citoyenne indispensable à la rupture, nous revendiquons la mise en place d’un nouveau modèle de développement économique, social et écologique !

Jacques Testart, dans sa dénonciation des dérives de nos sociétés au travers de l’ouvrage Le mur, le vélo et le citoyen écrivait « Chasser le gogo qui est en chaque citoyen, faire en sorte que ceux qui n'utilisent pas (ou trop peu) leur citoyenneté se réveillent, refusent les conditionnements aliénants et exigent de vivre autrement, c'est en cela que consisterait la révolution dans une République qui nous propose les moyens de la citoyenneté. ». Et Jean-Luc Mélenchon dans un discours le 18 octobre 2010 définissait: « La révolution citoyenne, c'est une révolution dans les têtes et dans les cœurs et pas seulement dans le quotidien de la lutte sociale et politique. ». 

Si ça devait exploser, prenez gare, car Gramsci avait prévenu «  Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître, et dans ce clair-obscur surgissent les monstres »… Et les monstres sont déjà à l’œuvre.

Amitiés progressistes,

Laurent Beaud

9 septembre 2015

Pour que vive l'éducation populaire!

Comme chaque année la rentrée des classes marque le début du temps de l’apprentissage pour nos chers bambins. Bien entendu, c’est l’occasion pour les parents de se poser des questions sur le socle des savoirs qui sera porté à leur connaissance, mais également sur les méthodes d’enseignements employées et sur la véracité de l’égalité des chances que clame haut et fort l’école de la république. Une chose est certaine, dans nos têtes, même si nous nous considérons comme intéressés et avertis par nos propres expériences, tout est brouillon quant aux nouvelles formes éducatives à inventer, quant aux réalités des fractures, des situations précaires. Et l’on ne peut pas dire que la énième réforme des institutions scolaires (que propose d’ailleurs à chaque rentrée le ministère de l’éducation !) stabilise nos conceptions en la matière. L’érudition est elle l’unique solution ? Quelle place pour les « manuels » vis-à-vis des « intellectuels » ? Devons nous choisir entre « littéraire » ou « scientifique » ? Enfin, existe t’il des solidarités dans le partage des connaissances ? Quel avenir pour le coopératif et le collaboratif dans une société gangrénée par la compétition et l’individualisme, résultantes du modèle économique ultra-libéral dominant ?

Dans la revue Les actes de lecture (n°92, décembre 2005), Jean Foucambert constatait et s’interrogeait : « L’inégalité d’accès aux savoir résulterait non seulement des modalités de leur distribution mais aussi de leur mode de production: Qui pose les questions, avec qui, par qui sont produites les réponses ?  (…) Le savoir dont a besoin une société pour être véritablement démocratique ne saurait se construire sans elle ». Nous souhaitons tous a priori faire société, mais quelques indices laissent à penser que l’ambition n’est pas encore en passe d’être réaliser tant il existe de l’exclusion sociale dans notre quotidien.

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En 2002, aux éditions La Découverte, la philosophe belge, Isabelle Stengers publiait Sciences et pouvoirs : La démocratie face à la technoscience.  L’auteur qui s’inquiète alors de la remise du destin du monde aux lois du marché, considère que dans nos sociétés, qui se veulent démocratiques, les données scientifiques sont souvent invoquées comme ultimes arguments d’autorité face au sens commun ou même contre les préférences de la population, de sorte que la science apparaît inévitablement comme produisant ou confortant la « pensée unique ».

Si certains faits scientifiques ont une importance pour la vie des citoyens, il est urgent pour Isabelle Stengers de redéfinir les rapports démocratiques qui existent entres la connaissance et le pouvoir. Dans le cas inverse, nous verrons s’installer la technocratie comme forme de gouvernement. Il s’agit d’explorer les invocations faites aux sciences pour justifier des décisions (ou non décisions) politiques et de s’interroger sur une redéfinition possible. De son propre avis presque utopique des rapports existants entre sciences et pouvoirs : « Si on ne croit plus à ce modèle de progrès là, personne n’est préparé aux types de pratiques alternatives que requiert un changement paradigmatique. ». Enfin l’ouvrage, en définitive véritable manifeste politique, veut remettre la contradiction et l’esprit critique entre les mains des citoyens pour créer un contre-pouvoir aux « sachants » via l’usage d’outils coopératifs et populaires : « la question qui se pose est celle de la production des savoirs et des pratiques (…) C’est donc la question d’une organisation sociale et culturelle qui reconnaisse et favorise non pas l’éducation des citoyens concernés par ceux qui savent ce qui est bon pour eux, mais leur participation active à un problème qui les intéresse".

Nous pourrions faire ici une critique acerbe de notre modèle scolaire et/ou éducatif, mais cela n’enlèverait en rien les réalités criardes existantes d’une société en manque de repères, et où les inégalités résident dans les disparités sociales et pécuniaires des familles dont sont issus les individus. Comme j’ai pu l’écrire il y a déjà quelques temps, si l’ascenseur social est en panne, qu’attendons nous pour appeler le réparateur ? Si l’école de la république est une machine à gaz difficile à faire évoluer, mais qu’il est selon moi encore possible de perfectionner, il n’en n’est pas moins que les progressistes ont la responsabilité de faire de l’éducation (pour tous) « l’arme la plus puissante pour faire changer le monde », tel que l’affirmât Nelson Mandela. Mais sans rien tenter, nous laisserons place au repli sur soi, à l’indifférence et aux populismes. Cela est brillamment dit par Antoine Gramsci lorsqu’il déclare : « L’ancien se meurt, le nouveau ne parvient pas à voir le jour. Dans ce clair obscur surgissent des monstres ».

Or il a existé en France une expérience grandeur nature d'un autre dispositif de partage des savoirs utiles aux gens de l'en bas, l’enseignement mutuel.

Dans une poésie de jeunesse en 1819, Victor Hugo lui rendît hommage la couvrant de louanges « j’écoute mal un sot qui veut que je le craigne, Et je sais beaucoup mieux ce qu’un ami m’enseigne. (…) Vois-les, près d’un tableau, sans dégoûts, sans ennuis, Corrigés l’un par l’autre, et l’un par l’autre instruits ». Ce modèle a tantôt disparu dans l’hexagone… mais a ressurgi là où on ne l’attendait pas, avec un succès étonnant, dans les années 1980 en Allemagne dans le cadre du français langue étrangère. La méthode, posée sur des bases psychologiques et pédagogiques modernes, est désormais largement répandue outre Rhin sous le nom de « apprendre en enseignant » (Lernen durch Lehren) et est appliquée dans toutes les matières et à tous les niveaux d'enseignement, de l'école élémentaire à l'université.

Comment s’en inspirer pour faire, comme disait Paulo Freire, que « le but de l’éducateur ne soit plus seulement d’apprendre quelque chose à son interlocuteur, mais de chercher avec lui les moyens de transformer le monde dans lequel ils vivent » ?

Et bien, la réponse est simple. Cela existe déjà, c'est l'éducation populaire. Nous devons le cultiver et faire le nécessaire pour que vive plus que ne survive l’éducation populaire !

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De nos prises de consciences depuis Condorcet, en passant par Auguste Comte, le front populaire ou Léo Lagrange, l’éducation populaire se veut comme étant un puissant levier pour déconstruire la pensée unique. Ce sont principalement des associations qui se préoccupent de la transmission aux plus modestes, l’art du don, de l’altruisme. Une véritable culture de l’échange.

Dans un monde marqué par la confiscation des savoirs au profit de l’idéologie dominante, l’éducation par tous, tout au long de la vie, est devenu un enjeu démocratique à part entière. Les mouvements d’éducation populaire ont, à la base, toujours été des mouvements de résistance. Il s’agit d’un espace pour la contestation des idées reçues. Il convient de nos jours de permettre et d’amplifier ces états d’esprit, au détriment de celles et ceux qui voudraient profiter des situations de misère pour confisquer l’émancipation et y apposer la stigmatisation et le rejet.

Car si en effet, l'instruction doit être accessible à tous, pour Condorcet, il n'y a pas de démocratie du pouvoir, sans démocratie du savoir. Que cela soit les Maisons Pour Tous (qui sont malheureusement devenues trop souvent des résidences pour associations, aux buts parfois « lucratifs », et qu’il conviendrait de rendre l’originalité), les Universités Populaires, ou les autres associations de quartiers ont peine à retrouver leur place aujourd'hui dans l'évolution du capitalisme, tant ce dernier a travaillé à éliminer le désintéressement. La mouvance, orientée vers la problématique actuelle du lien social, qui s'incarne aujourd'hui dans des formes d'actions sociales telles que celles prônées par les centres sociaux, l'accompagnement social qui permet de prendre soi-même sa vie en main est en train de disparaître.

Dans un article de l’Humanité de Paule Masson et Jean-Philippe Milesy, le constat est indéniable, la porte se referme en raison des crises : « Depuis la crise, un autre phénomène, qui avait pris sa source dans les politiques de décentralisation, s’accentue: l’étouffement budgétaire. D’importantes structures comme les Cémea, la Ligue de l’enseignement, les Francas, les PEP, etc. ont subi des baisses drastiques de subventions publiques, ce qui les a poussées à délaisser des projets et à supprimer des postes. Parallèlement, la barrière de plus en plus arbitraire qu’érigent nos sociétés entre les «sachant» et les autres, les reculs démocratiques, la domination des industries du divertissement, l’appauvrissement du débat politique ouvrent un espace nouveau pour la contestation des idées reçues, que la recrudescence des universités populaires depuis 2000 incarne pour une part. Car la métamorphose technologique à l’œuvre est sans doute un des plus sûrs chantiers de renouveau de «l’éducation du peuple par le peuple», maxime fondatrice de l’éducation populaire. »

Les citoyens doivent (encore) s’emparer des grandes questions politiques et apprendre à réfléchir par eux-mêmes car « dans la vie il n’y a pas de solution, mais des forces en marches. Il s’agit de les développer et les solutions suivent » Antoine de Saint Exupéry. Nous sommes tous experts des problématiques que nous vivons ; échangeons car cela n’a pas de limite, continuons !

« La famille, c’est l’éducation de chacun. L’école, c’est l’éducation pour tous. L’éducation populaire, c’est l’éducation par tous, tout au long de la vie. Elle prend en compte la complémentarité des savoirs académiques formels avec ceux issus des pratiques sociales », résume Éric Favey, secrétaire général adjoint de la Ligue de l’enseignement.

Alors, militons pour que vive l’éducation populaire ! Redonnons-lui les moyens de sa pertinence… mais aussi de son développement.

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Au passage, une grosse bise à I Love Educ Pop qui ne manquent pas d’énergie pour faire passer les messages, à mon ami Zob pour ce slam (et pour son travail discret extraordinaire à la paillade au Théatre Jean Vilar)

Soyons le moteur de l’écologie sociale, à la prise de pouvoir de la société civile sur ses territoires aux convergences locales entre émancipation sociale et transitions écologiques, au dépassement par en bas du système capitaliste (économie culture), de plus en plus le cancer qui dévore la planète et ses humains.

Avec mes amitiés progressistes,

Laurent Beaud

31 août 2015

Droits des Femmes: Au Swaziland la danse du roseau qui plie mais ne rompt pas!

Il y a parfois des infos qui mériteraient plus d’attention de la part de nos médias car elles révèlent davantage que ce qu’elles racontent à prime abord, notamment sur l’état du monde dans lequel nous vivons.

Bien que respectueux des cultures qui ne sont pas miennes, en tant que progressiste et féministe, il y a des justifications qui sous couvert de « folklore » ou de « coutumes » me dérangent fortement.

Au royaume du Swaziland, ce vendredi 28 août plusieurs camions qui transportaient des dizaines de jeunes filles à la danse des roseaux sont entrés en collision sur la chaussée menant au lieu de la réunion. Les médias locaux ont décrit une scène d'une extrême violence, avec notamment une route couverte de sang. Les jeunes femmes qui voyageaient dans la benne ouverte des camions ont été projetées sur la route où certaines ont été écrasées. A noter que selon certaines sources, les journalistes locaux auraient été empêchés de s'approcher de la scène du drame ; certains même forcés d'effacer leurs photos. Au moins 38 jeunes filles sont mortes et des dizaines d'autres ont été grièvement blessées.

Jusque là, un simple fait divers relatant un monstrueux et sanglant carambolage dans un pays en voie de développement, où j’imagine la qualité médiocres des infrastructures routières, une population vivant en grande partie dans la pauvreté, des moyens de transports rares et des règles de sécurité quasi inexistantes.

Mais voilà, dans l’information il y a des détails qui me posent des questions : Que font des « dizaines de jeunes filles » dans des « camions-bennes » ? Qu’est ce que la « danse des roseaux » au Swaziland ? 

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Et c’est là que le bas blesse ! Lorsque l’on creuse un petit peu pour découvrir les charmes et l’exotisme de ce petit pays, enclavé en Afrique du Sud, d’un million et demi d’habitants et son « folklore », voilà ce que l’on découvre : .Le petit royaume du Swaziland marque son originalité par son monarque, Mswati III (unique dirigeant du pays depuis 1982) et sa façon d’exercer le pouvoir et d’imposer une certaine conception de la place de la femme dans la société.

Au Swaziland, il est interdit de faire la promotion de la contraception, du préservatif. Alors qu'un quart de la population est touché par le SIDA, la meilleure des protections pour les jeunes filles doit être leur « virginité », au point que le royaume leur octroie généreusement la somme de 14euros par mois pour éviter toutes relations sexuelles.

Côté « us et coutumes », une manifestation géante se déroule chaque année : la « danse des roseaux ». Comprenez plusieurs dizaines de milliers de jeunes filles vierges à peine pubères (qui varient entre 30 000 et 80 000 selon les sources) réunies pour danser, seins nus, devant le monarque. Eventuellement, ce dernier pourra en choisir une et lui faire l'honneur de devenir sa nouvelle femme. Polygame, il a actuellement 14 femmes à 48ans.  Les jeunes filles arrivent de tout le pays – et on vient de le découvrir donc via cet accident par camions-bennes - en espérant être élues et vivre le reste de leur existence comme des reines. Car si le Roi est à la tête d'une fortune de plus de 100 millions d'euros (il est considéré comme plus riche que le roi du Maroc), plus des deux tiers de la population du pays ne mangent pas à sa faim (vivent sous le seuil de pauvreté, 125ème pays selin l’Indice de développement humain). Le traitement réservé aux femmes du Roi (palais personnel, BMW, shopping de luxe...) apparait donc comme salutaire pour des jeunes filles issues de familles pauvres.

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Et si le Roi préfère payer des festivités à quelques 13 millions d'euros (l'équivalent de 60% du budget santé) plutôt que d'aider à financer l'éducation, son entourage assure qu'il reste populaire. Difficile d'un autre côté d'entendre la contestation, quand les partis politiques y sont interdits dans la constitution. Le transport des jeunes « danseuses » dans ces camions non sécurisés soulève également l'indignation d'autant que le gouvernement du Swaziland a récemment stoppé la distribution d'aide alimentaire d'urgence destinée aux victimes de la récente sécheresse, faute de transport « disponible » dans le pays !

Mais au royaume du Swaziland, les désirs  de Mswati III se moquent pas mal des droits des femmes et ne sont vraisemblablement pas sa priorité. Le port de la mini-jupe ou du pantalon taille basse y est d’ailleurs interdit pour prévenir du viol. En effet, les femmes sont considérées comme responsables de leur viol et les récalcitrantes aux tenues vestimentaires prohibées se voient infliger une amende de plus de 8000 euros, assortie d'une peine de 6 mois de prison. Les autorités justifient la loi car elle permettrait d’améliorer la vie des femmes : « le viol est facilité parce qu'il est facile de retirer la petite pièce de tissu portée par les femmes » expliquent-elles. Ainsi, les arguments de bas étages utilisés par les agresseurs sexuels du genre « elle l'a bien cherché en s'habillant comme ça » trouvent au Swaziland toute leur légitimité. Enfin, selon la constitution (récemment signé par le roi) les femmes n'ont toujours pas le droit de faire un emprunt bancaire ou de devenir propriétaire d'un bien immobilier. 

En 2010, Amnesty International dans un rapport intitulé Trop Tard, Trop Peu : l’échec de la réforme juridique en faveur des femmes au Swaziland, n’y était pas allé pas par quatre chemins pour dénoncer: « Depuis l’adoption de la nouvelle constitution, le gouvernement n’a pas tenu sa promesse de modifier d’autres lois pour mettre les femmes sur un pied d’égalité avec les hommes. Au Swaziland, les organisations de femmes se battent pour réformer une législation qui considère les femmes comme citoyens de seconde zone. En dépit de ses promesses répétées, il n’a pas modifié les lois en question. Par conséquent, les femmes du Swaziland ne sont pas protégées par la législation et sont victimes de discriminations autorisées par la loi (viols conjugaux, mariages forcés ou précoces…). Elles n’ont d’ailleurs pas le statut d’adulte ». L’ONG appelait alors à écrire aux autorités.

Mais a priori nous ne sommes pas prêt de convertir le roi du Swaziland à notre triptyque « liberté, égalité et fraternité » : la presse n’a pas le droit de se rendre sur les lieux pour rendre compte, la police réfute la gravité de l’accident, et l’histoire se souviendra que la fête des roseaux a malgré tout bien eu lieu pour satifaire le roi!

Amitiés Socialistes et féministes,

Laurent Beaud

 

19 août 2015

Prélude du Social-libéralisme en austérité majeure! Le socialisme se meurt, vive le social-libéralisme!

Dans mémoires interrompues, François Mitterrand transmettait parmi ses dernières réflexions le message suivant : "Je crois pour demain comme hier à la victoire de la gauche, à condition qu’elle reste elle-même. Qu’elle n’oublie pas que sa famille, c’est toute la gauche. Hors du rassemblement des forces populaires, il n’y a pas de salut." Nostalgique du 10 mai 1981, Paul Quilès, son directeur de campagne de l’époque rapportait dans une tribune au JDD, publiée le 9 mai 2015: « Aujourd’hui, je suis étonné et souvent attristé de voir à quel point la gauche semble avoir du mal à s’inspirer de cette stratégie, qui n’a pourtant pas perdu de sa pertinence. La France a besoin d’espoir et nos concitoyens sont en attente de véritables changements. Ils supportent en effet de moins en moins les injustices criantes de cette société et ils voient bien que la jeunesse est en panne d’avenir, que les classes moyennes sont désemparées, que la précarité s’accroît, que la laïcité est contestée, que la voix de la France est affaiblie et parfois inaudible. »

Mais voilà ! L’unité de la Gauche ne se décrète pas. Si l’arrivée au pouvoir d’un Mitterrand en 1981 ne fut que la résultante d’un travail de longue haleine autour de la construction d’un programme commun et de l’union des Gauches. La stratégie gagnante ne consiste pas à s’autoproclamer tête de gondole et à appeler au rassemblement derrière soi. Si le rassemblement est ainsi la seule solution pour permettre la réussite de la Gauche, le choix des personnes ne doit pas précéder l’élaboration du projet ; la démocratie d’opinion, les sondages ou les lobbies privés ne doivent pas être la boussole des décisions à prendre.

Le contexte politique a certes évolué : les grandes centrales politiques de gauche (Parti Socialiste, EELV et Front de Gauche) ont depuis su certes retenir à minima les militant-e-s issu-es- d’horizons bien différents, ont su parfois cultiver l’art du débat et des idées, mais n’ont jamais réussi pour autant à dépasser leurs clivages idéologiques fondamentaux pour mettre en place un socle commun solide.

A chacune des étapes de son histoire, la gauche s’est trouvée confrontée à la question majeure de son unité. L’on dit que la division c’est toujours l’impuissance ; alors c’est seulement lorsqu’elle est unie que la Gauche est en mesure de mobiliser la société autour d’un projet alternatif et d’accéder au pouvoir. Or la question de l’union de la gauche ne peut pas se résoudre par des accords d’appareils à la veille d’une élection. D’abord parce que la gauche a besoin d’un projet partagé pour se rassembler, un projet qui fasse culture commune, un projet qui associe les citoyens tant dans sa construction que dans la retranscription des aspirations populaires, enfin un projet qui respecte les valeurs humanistes, écologiques et socialistes, un projet qui se respecte soi-même.

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Depuis un demi siècle, le Parti à la rose et au poing déclare se situer au cœur des pensées de Gauche. Le Parti Socialiste se présente comme l’héritier de Jaurès, de Guesde, de Blum ou de Mitterand, et se réfère dans ses discours aux doctrines socialistes originelles - qui par définition, rappelons-le au passage, visent un modèle politique et économique à l’inverse du libéralisme – tout en cherchant à démontrer qu’il colle à la modernité des problématiques du monde contemporain. Mais quand dans les années 1980 la trajectoire a entamé une virgule à l’acceptation libérale, quelque chose est devenu semble t’il inéluctable : une sorte de grand écart entre les paroles et les actes que ne comprennent plus les citoyen-ne-s qui restent malgré tout toujours aussi intéressés par les débats politiques. Cette trajectoire imprévue lève un certain nombre de questions chez les progressistes, et ce peu importe leurs courants de pensée, qui se retrouvent désormais orphelins de la nécessaire transformation de l’utopie en réalité.

Le Parti Socialiste est il toujours « Socialiste »? A t’il définitivement fait son Coming Out libéral ? Est t’il toujours en adéquation avec les revendications, les attentes actuelles des classes moyennes et populaires ?

En 2012, le Parti Socialiste, avec François Hollande, retrouve la présidence de la république presque 20 ans après l’avoir quitté. Mais point de folie populaire, beaucoup d’inquiétudes et beaucoup d’attentes, la France est engluée dans les crises depuis 2008, et les françaises et les français ont, dans les urnes, plus choisi de rejeter, de sanctionner l’hyper-président Sarkozy que de donner un triomphe au président « normal » Hollande. La France de ce début de XXIème siècle n’attendait pas l’homme providentiel mais bien la perspective d’un avenir où l’humain reprendrait la main sur l’économie, où les notions de solidarité et de partage permettraient enfin de faire société, où il s’agissait d’effacer l’individualisme à outrance et le repli sur soi instauré par Nicolas Sarkozy et ses invectives sur le « travailler plus pour gagner plus », sur le « vrai » travail ou sur l’intérêt d’un débat sur l’identité nationale.

Au delà de l’arrivée au pouvoir de François Hollande, les difficultés actuelles, pour tout un chacun, sont le décryptage et la lecture de la ligne économique adoptée et portée par celui-ci. Mais avait t’il jusqu’alors vraiment cacher son jeu ou ses idées ? En réalité, non ! Dès 1991 dans L’heure des choix, pour une économie politique, publié chez Odile Jacob (et coécrit avec Pierre Moscovici), Hollande avait tenté de démontrer « que la gauche, comme la droite, était capable d’être bonne gestionnaire », le tout en se félicitant de « la politique de rigueur menée par François Mitterand à partir de 1983: inflation maîtrisée, coûts salariaux retenus, allégements fiscaux substantiels pour les entreprises.»

Cette politique, il l’a qualifiée volontiers de « néo-libérale. ». Dans ce pavé tout à fait banal qui n’a pas développé de théories économiques ou politiques révolutionnaires – il n’avait pas d’ailleurs pas fait rêver les foules – François Hollande avait eu le don d’annoncer clairement la couleur. Intéressant d’y lire, "Nous sommes tous keynésiens. Peu d’économistes intéressés par la politique ne le sont pas.", postulat ou constat vite complété par un « malgré tout la "Théorie générale" est à la fois datée et limitée ». François Hollande avait dû oublier depuis que John Maynard Keynes n’était pas favorable à une hausse d’impôts pour combler les déficits. Mais l’art des discours politiques n’est plus à une contradiction près ! Surtout lorsque à l’occasion d’une conférence de présentation du bouquin à la Sorbonne, Compère Moscovici et Compère Hollande avouaient devant un parterre d’étudiants qu’appliquer de tels choix économiques « ce serait agir comme un industriel qui faisant des pertes et qui déciderait d’augmenter les prix.»

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Ceci expliquant peut être cela, alors que François hollande n’a pas mis en œuvre une politique clairement assumée à gauche depuis son élection, ni même coller à ses 60 engagements ou à ses promesses du Bourget, c’est au lendemain de la cuisante défaite des municipales de 2014 que le président de la république choisissait de nommer premier ministre le plus droitier de son camp, Monsieur 5% de la primaire de 2012, Manuel Valls. Par cette nomination, la coupure est cinglante entre l’électorat qui appelait à une réorientation plus à gauche de la politique menée, le peuple qui ne cesse de voire se creuser les inégalités, et un Parti Socialiste devenu autiste devant la montée inexorable du chômage, préférant s’adresser directement au patronat plutôt qu’aux travailleurs ou aux personnes en situation de recherche d’emploi.

Mais oui, il fallait y penser ! Lorsque l’action ne colle pas au discours, autant changer le discours ! Et comme l’action flirte vers la droite et veut accompagner un développement économique et social libéral, autant choisir celui qui n’a pas ménager sa peine dans l’appareil pour changer le nom et le fond idéologique du Parti Socialiste. Le changement c’est maintenant ! Pour ce qui est du discours, cela est déjà fait depuis longtemps. François Hollande en optant (sans en discuter avec sa formation politique) pour une politique de l’offre, en mettant en œuvre le pacte de compétitivité - 20 milliards de baisse d’impôts et de charges aux entreprises par ans à partir de  2012 - a bel et bien fait son Coming Out libéral. Manuel Valls et François Hollande en composant une équipe de gouvernement toute entière acquise à leur cause, rivalisant d’ingéniosité pour plaire au maestro et au matador, d’Emmanuel Macron à Michel Sapin, en passant par Pierre Moscovici ou François Rebsamen, n’ont fait que transcrire leurs visions individuelles du fonctionnement de l’économie (des leviers à user pour relever l’enjeu d’une société à reconstruire), et ont dénaturé les bribes de socialisme qui persistaient au sein du Parti Socialiste. 

Mais à quoi jouent t’ils ? C’est la fête à la provoc, le concours de la petite phrase, à celui qui sortira la plus grande connerie ! Petit florilège non exhaustif : « Moi, j’aime l’entreprise » (devant le patronat, sous-entendu les autres ou la gauche n’aime le travail ou l’entreprise) Manuel Valls, «Il faut des jeunes qui aient envie de devenir milliardaires» Emmanuel Macron, « Il ne s’agit pas d’inverser la courbe du chômage. Il faut faire diminuer le nombre de chômeurs » François Rebsamen, « une croissance nulle conforte nos objectifs en matière de croissance » Michel Sapin, « Le contrat de travail n'impose pas toujours un rapport de subordination entre employeur et salarié: il est signé par deux personnes libres qui s'engagent mutuellement. Dans les situations de plein emploi, c'est même l'employeur qui recherche les salariés... » François Rebsamen, « Je demande à Pôle emploi de renforcer les contrôles pour être sûr que les gens cherchent bien un emploi » François Rebsamen, « Le FN est 'une forme de Syriza à la française, d'extrême droite » Emmanuel Macron, « "La Terreur a creusé un vide émotionnel, imaginaire, collectif: le roi n'est plus là! On a essayé ensuite de réinvestir ce vide, d'y placer d'autres figures (…) La démocratie comporte toujours une forme d'incomplétude car elle ne se suffit pas à elle-même.» Emmanuel Macron….

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Comme il est difficile de départager les compétiteurs dans ce genre de jeu, dans les faits c’est à celui qui fera ou imposera sa réforme…libérale : Pacte de compétitivité (Crédits d’impôts : CICE, CIR…), Pacte de responsabilité (allégements de charges pour aider les entreprises privées à augmenter leurs marges et devenir plus compétitives), Accord National Interprofessionnel du 11 janvier 2013 sur la compétitivité et la sécurisation de l’emploi, Loi relative au dialogue social et à l’emploi, Loi relative à la réforme de l’inspection du travail, Lois « Macron » pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques…Et comme, il n’y en a jamais assez pour satisfaire la Troïka (obnubilée à vouloir faire respecter sous deux ans l’objectif d’un taux de déficit de 3% du PIB, serpent de mer fixé par le traité de Maastricht en 1992), Manuel Valls a promis à Juncker, pour les mois à venir, de travailler plus encore dans la direction de l’assouplissement du temps de travail dans les entreprises en difficulté, de la réduction des rétributions de l’assurance chômage ou du développement des caisses de retraites complémentaires. Rien que ça !

Nous sommes bien loin des conceptions socialistes préconisant une nouvelle organisation de la société en vue de faire valoir les intérêts généraux sur les intérêts particuliers, de réaliser une plus grande justice et fraternité entre les hommes et d’imposer le progrès social et la dignité pour tous. Mais a priori selon Manu, je dois être passéiste et c’est mon surmoi marxiste qui doit ressurgir.

La véritable question est de savoir si un gouvernement issu d’une grande formation politique comme le Parti Socialiste doit appliquer les propositions, les valeurs, les fondamentaux de ce dernier, ou si cela est acceptable que ce gouvernement puisse s’affranchir de sa base militante pour imposer des positionnements et des choix personnels, non débattus démocratiquement avec elle, et qui semble loin de faire l’unanimité en interne. La réponse est sans équivoque, la distorsion des points de vue est désormais trop profonde entre les élus, l’appareil et la base. Seule la chute ultime saura remettre à plat les choses. Mais que restera t’il d’ici là ?

Le congrès socialiste de Poitiers devait être le point d’échange ou de réajustement, cela n’en fut rien! Outre le fait que le débat n’ait pas eu lieu, c’est le spectacle lamentable de la distribution d’une soupe fade, adoubé de la volonté de faire de ce moment un vote de confiance (Motion A – Valls-Aubry-Cambadélis) en opposition à un vote de censure (Motion B – Paul - dite des frondeurs). S’il est vrai qu’au sein de la formation centenaire il existe une aile gauche, estimée régulièrement autour du tiers des adhérents, il n’en n’est pas moins que son action se cantonne à un acte de résistance idéologique improductif et inoffensif, à un témoignage de dernier des mohicans face au légitimisme sans faille des apparatchiks, porté ici par la voix de Jean-Christophe Cambadélis.

Il ne peut dès lors y avoir qu’un constat frappant et alarmant: la fronde a échoué, les demandes et les discours de réorientations ne pèsent rien face à un appareil ne pense qu’à se préserver lui même, et le parti se vide de sa substance et de ses forces vives en raison de l’autisme patent. Question d’arithmétique : pour le congrès de Reims en 2008 le nombre d’adhérents revendiqué était de 232 511, pour le congrès de Poitiers il n’était plus que de 131 000… et ce sont seulement 65 432 qui ont voté ; Quid de celles et ceux qui ne se sont pas exprimés? Quid des déçus de ce dernier rendez-vous ? Que feront ils ?

Les principales revendications du texte A Gauche ! Pour Gagner ! étaient, en quelques mots, la réorientation du budget par la loi de finances à voter à la rentrée par la représentation nationale, un autre ciblage des aides aux entreprises instaurées par le pacte de compétitivité – avec le CICE en ligne de mire… une idée d’ailleurs partagée par le texte majoritaire de Camba ! - et l’envie de créer les conditions du rassemblement de toute la Gauche autour d’un contrat de gouvernement. Et ben, c’est la rentrée politique et c’est une fin de non recevoir que vient d’expédier vendredi dernier Valls et Sapin vers le Parti Socialiste, faisant au passage pas mal de cocus. Il n’y aura pas de changement de cap !

Il aurait difficile de ne pas prévoir l’échéance à la vue de l’histoire qui s’est écrite de façon continue ces dernières années. C’est ainsi que je considère que la belle idée du Socialisme ne pourra s’épanouir que dans la construction d’un cadre nouveau respectueux et cohérent des discours et des idées que nous avons toujours défendu. Construisons la Nouvelle Gauche Socialiste ! 

C’est maintenant qu’il faut empêcher le piège mortel pour la gauche qui se met en place : son éclatement entre un pôle de radicalité confiné dans le registre de la contestation et un pôle de centre gauche confiné dans celui de la gestion. Au sein du Parti Socialiste, c’est déjà le scénario que certains veulent imposer ! Accepter un tel partage des rôles entérinerait le retour de toute la gauche dans la division qui a permis la domination de la droite sur notre pays durant des décennies. On connaît la suite : faute d’accord à gauche, on lorgnerait vite, comme dans d’autres pays, vers le centre. C’est à dire vers la droite.

De ce point de vue, il n’y aura pas, à l’évidence, d’union possible de la gauche autour d’une ligne sociale-libérale. Ni EELV et ses composantes, ni le Front de Gauche et ses composantes, ni la gauche des mouvements ne s’engageront avec le Parti Socialiste si son projet de gouvernement ne marque pas un certain nombre de ruptures avec la logique marchande responsable du creusement des inégalités et du désastre environnemental.

Notre désir est le rassemblement de tous ceux qui souhaitent une rupture avec le néolibéralisme. Il s’agit non seulement de construire une alliance électorale, mais plus encore de l’articuler avec une stratégie de mobilisation de la société et d’implication citoyenne. Il s’agit certes de réaliser l’union des partis de gauche, mais surtout de le faire en lien avec la dynamique des mouvements citoyens.

Attendre l’usure de la droite comme une sorte d’alternance automatique c’est prendre le risque majeur de voir surgir une extrême droite en embuscade, vers laquelle se tourneraient tous les désabusés et les déçus.

Entre le renouveau du socialisme et les renoncements du social-libéralisme, il faut choisir.

Amitiés Progressistes et Socialistes.

Laurent Beaud

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