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le Kaléidoscope....
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2 novembre 2012

Lettre Ouverte Tourisme

Monsieur Laurent Beaud

1XXXXXXXXX

34000 Montpellier

 

                                                                    Monsieur François Hollande

                                                                    Président de la République


                                                                    Palais de l'Elysée


                                                                    55 rue du faubourg Saint-Honoré


                                                                    75008  Paris

 

                                                                                                               Montpellier, le 24 juillet 2012 

 

Monsieur le Président de la République, 

C’est avec un grand plaisir, tout d’abord, que je me permets de vous adresser mes plus sincères félicitations, tant pour votre élection dernière que pour vos premiers pas vers le Changement essentiel que vous engagez pour la France et l’avenir des Français. Malgré la situation de crise économique et sociale que notre pays traverse actuellement, je crois en votre action et pense que les forces de progrès sauront résoudre un grand nombre des difficultés actuelles et rétablir une certaine forme de justice sociale.

Comme vous le savez, la France est depuis de longues années la première destination touristique au monde ; prés de 80 millions de touristes choisissent chaque année la France. La rapide croissance économique des « Trente Glorieuses » (la hausse du pouvoir d’achat, l’accession au tourisme à de nouvelles catégories sociales), le progrès social dans son ensemble (l’augmentation du temps libre, l’extension des congés payés ou l’allongement de la durée de la vie et l’abaissement de l’âge de la retraite….), l’urbanisation croissante (l’essor du désir d’évasion des citadins) mais aussi le développement technologique des transports ont mené la France à cette position de leader.

L’Hôtellerie et la Restauration sont les acteurs indispensables et indissociables au développement et à la pérennisation du Tourisme. Ce secteur d’activité, outre le fait qu’il résiste très bien dans le contexte actuel tendu et qu’il pèse un poids non négligeable sur le marché du travail, a pour intérêt premier  pour l’économie française d’être non-délocalisable. La caractéristique structurelle  particulière de ce secteur   vient  de la part très importante  de PME et de TPE du secteur privé, employant un contingent de 915 000 salariés. Alors que moins de 7% des employés sont syndiqués, plus de 90% de leurs patrons sont adhérents à un organisme syndical. Si cela s’explique peut être par le manque d’attractivité ou de confiance envers les centrales syndicales traditionnelles, mais aussi, plus certainement par peur de répressions patronales, il n’en n’est pas moins que la majorité de ces salariés n’entendent pas exprimer publiquement leurs difficultés et leurs inquiétudes et ne voient pas ou très peu leurs intérêts, tant individuels que collectifs, défendus.

Employé du secteur privé dans l’Hôtellerie sur Montpellier, depuis prés de 15 ans, je viens vers vous, Monsieur François Hollande, modestement, en tant que simple citoyen afin d’attirer votre attention et votre réflexion sur un grand nombre d’inquiétudes et de malaises que  partagent et vivent beaucoup de personnes travaillant dans ce secteur d’activité.

Depuis 1997, la convention collective Hôtels, Cafés, Restaurants (HCR),  définis les règles et les conditions particulières du travail des employés  dans cette branche. Ce texte réglementaire avait pour but de prendre en compte les spécificités de ces métiers et devait permettre d’ajuster l’application du Droit du travail aux contextes particuliers et aux contraintes propres à ce secteur. Il est vrai que l’établissement de cette convention a permis pour les travailleurs, une garantie de conditions de travail et de revenu a minima et pour les employeurs une garantie de paix sociale. Toutefois, sur le fond, cette convention est restée assez inégalitaire, en tout cas, très défavorable aux travailleurs et qu’elle n’a que très peu évoluée depuis.

Si la plupart des personnes qui ont choisi ces métiers, l’ont fait de par un gout prononcé pour le service, le contact, l’accueil ou bien dans un optique de continuité, de transmission des savoir-faire traditionnels français, il s’avère désormais que cette branche est en manque d’attractivité  malgré des résultats économiques très positifs.  Les conditions de travail (horaires difficiles, précarité des contrats proposés, faiblesse des rémunérations) et les contraintes sociales (pénibilité liée aux rythmes, difficultés d’organisation de la vie familiale, absence d’avantages sociaux) étant restés les mêmes, l’Hôtellerie et la Restauration a du mal à recruter et à fidéliser ses employés dans un marché national du travail où le taux de chômage ne cesse de progresser. Dans un communiqué de presse du 17 juillet 2012, Roland Heguy, le Président de l’UMIH, n’en n’a pas un autre constat, il déclare « En effet, dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration, 90% des entreprises ont moins de 10 salariés et c’est un secteur qui connaît des difficultés de recrutement (…) il faut réduire les inégalités entre les salariés des grandes entreprises, qui bénéficient de prestations sociales et culturelles via leur comité d’entreprise, et ceux des petites entreprises dont les avantages sociaux sont souvent absents ». Cependant, les patrons et leurs représentants, s’obstinent à nier les évidences : le secteur de l’Hôtellerie Restauration,  s’il ne se transforme pas rapidement, tant dans ses mœurs et que dans ses pratiques, aura de plus en plus de difficultés pour embaucher et conserver ses forces vives. Il perdra peu à peu la qualité des prestations qu’il propose, et alors que la gastronomie française vient d’être reconnue par l’UNESCO, sa réputation internationale risque d’en être touchée.

L’apogée du lobbying patronal et le cadeau fiscal de la TVA; La force du patronat dans l’Hôtellerie Restauration vient de son corporatisme et de la puissance lobbyiste de ses Syndicats auprès des politiques. A l’heure où la France fête les 250 ans du Contrat social de Jean Jacques Rousseau, il est impensable de voir une telle expression d’intérêts particuliers au détriment de l’intérêt général, sous peine de voir menacer la démocratie de par manque de compétence et de vigilance des pouvoirs publics.

Réclamée depuis 30ans (notamment par Jacques Borel) promise en 2002 par Jacques Chirac, c’est en 2009 avec l’ancien président, Nicolas Sarkozy, qu’est mise en place une baisse de TVA dans la restauration, celle-ci passant d’un taux normal à 19,6% vers un taux réduit à 5,5%. Ce cadeau fiscal (d’environ 2,4 milliards d’euros par an pour l’état) fut obtenu en échange de promesses du secteur : baisse des prix à la carte pour le consommateur, amélioration sociale des salariés  et investissements de modernisation des établissements. L’application de cette décision est la parfaite illustration d’une mesure stérile obtenue par la seule et intense pression d’une profession. Il s’agissait avant tout  de revendications particulières de quelques-uns qui sont parvenus à imposer en échange de leurs voix un ensemble de règles de droits.

Les chiffres sont loin des espérances relatives aux créations d’emplois supplémentaires promises et ce malgré un conjoncture économique très positive pour ce secteur. Concernant les prix, alors que les tarifs TTC obtenaient une baisse de 14,1%, ils n’ont diminué que de 1,3% avant de repartir à la hausse dés l’année suivante, ce qui bien évidemment n’a produit aucuns effets pour les consommateurs. Pour l’amélioration sociale, la situation est encore plus navrante, les employeurs se comportant comme des Nababs, donnant d’une main et reprenant de l’autre, revenant vers un paternalisme patronal des années 70. Alors qu’en 2006, une 6ème semaine de congés payés était accordée pour compenser les anomalies de la convention collective, celle-ci disparaissait l’année suivante. En 2009, une prime « à la TVA » fut attribuée aux salariés, puis annulée avant d’être rétablie récemment. D’ailleurs aujourd’hui, les patrons menacent de retirer cette prime en cas d’augmentation du taux actuel de 7%. En 2011, un régime de complémentaire santé obligatoire est mis en place. Certes cela a permis aux salariés les plus modestes d’être mieux couvert, mais il a surtout obligé une grande partie des employés à abandonner leur mutuelle initiale (parfois plus avantageuse, notamment pour les employés ayant des enfants) au détriment d’une complémentaire imposée. Il est insupportable de voir les patrons se féliciter d’une telle mesure comme étant une avancée sociale octroyée par leurs soins, à la façon « Bon père de famille » ; les salariés ne seraient ils pas capables à titre privé de prévoir ou choisir ce genre de choses pour eux-mêmes et leurs familles ? Concernant la promesse de modernisation des établissements, les syndicats patronaux rétorquent que les chefs d’entreprises préfèrent attendre d’avoir une meilleure visibilité sur 5 ou 10 ans pour engager des investissements.

Monsieur le Président, comme vous l’avez promis, il est temps de rencontrer les professionnels de la branche afin d’apprécier l’efficacité ou non de la baisse de la TVA ainsi que d’analyser les résultats produits en contreparties.

En 2007, la loi dite TEPA, mise en place par le gouvernement Fillon est reçue comme une aubaine par les employeurs de l’hôtellerie et de la restauration. En effet, les activités de ce secteur sont très gourmandes en main d’œuvre et la défiscalisation des heures supplémentaires est perçue comme un gain immédiat par la profession, celle-ci préférant économiquement de loin avoir recours aux heures supplémentaires exonérées de charge plutôt que d’embaucher ne nouveaux salariés. Comme vous vous étiez engagé à le faire, Monsieur le président de la république, vous venez de faire supprimer cette loi anti emploi, inefficace en terme de pouvoir d’achat des salariés et très couteuse à l’état. De par cet engagement tenu, je tiens à vous féliciter et à vous encourager dans votre quête d’efficacité économique et de justice sociale. Toutefois, rappelons que les Cafés, Hôtels et Restaurants sont à 90% des TPE /PME, qui continuerons à profiter d’exonérations alors que désormais cela ne sera plus le cas pour les salariés de ces mêmes entreprises.

Le 22 juillet 2012, une nouvelle réglementation pour la classification des hôtels de tourisme en France est entrée en vigueur. Celle-ci fut élaborée en 2008 par les 5 principaux syndicats hôteliers (UMIH, CPIH, SYNHORCAT, FAGIHT et GNC) sous la directive du groupe ACCOR, remplaçant les 30 critères de la classification précédente par 246 critères censés être plus proches des standards internationaux. Même s’il faut reconnaître qu’il est très intéressant de voir réévaluer ce classement tous les 5 ans, il me semble que cette réforme cache un certain nombre d’incohérences.

En effet, il sera appréciable de constater plus tard le nombre d’établissements qui auront profité de cette occasion pour gagner une (des) étoile(s) et de fait qui auront ajusté leurs tarifs à leur nouvelle catégorie, pour des investissements de mise en conformité assez minimes, notamment dans les grandes chaines hôtelières qui ont eux-mêmes établies les critères. Il est difficile dans ce domaine et dans bien d’autres d’être à la fois juge et partie. De même, Monsieur le président, il est assez navrant de voir qu’aucun des critères ne concernent la situation sociale des employés. Il aurait été intéressant que soit greffé à cette nouvelle classification, l’obligation pour les entreprises d’employer un certain pourcentage de contrat à temps plein ou en CDI dans leur contingent ; ou bien même une grille salariale évolutive en fonction des étoiles visées.

En conclusion, il y a urgence, Monsieur le Président de la République, que ces sujets soient abordés rapidement. Un grand nombre de réformes et/ou rectifications sont nécessaires pour rétablir une justice sociale et fiscale, mais également redynamiser l’emploi dans un secteur qui a profité de nombreux d’avantages divers et variés.  Les solutions existent, elles demandent courage, sincérité et inventivité, ne sont pas forcement couteuses. Je vous réaffirme ma confiance envers votre personne et me tiens modestement à votre disposition si nécessaire afin d’approfondir ces sujets et éventuellement de vous exprimer quelques unes des solutions possibles.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président de la République, à l’expression de ma très haute considération 

Laurent Beaud

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