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le Kaléidoscope....
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8 juin 2014

Street Art: Montpellier fait le mur!

« Il est interdit d’interdire. », « L'imagination prend le pouvoir ! », « Les murs ont la parole. », « Les murs ont des oreilles, vos oreilles ont des murs. »,  « La liberté d’autrui étend la mienne à l’infini », furent quelques uns des slogans et graffitis qui caractérisèrent l’esprit des évènements de mai 68. La révolution manquée révolutionnât toutefois la réflexion individuelle et collective, et marquât par sa spontanéité et sa recherche de créativité autour de valeurs nouvelles pour l’époque. 

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Le Street Art tel que nous le rencontrons de nos jours, sous certains aspects, revêt l’image d’une réplique sismique de l’esprit soixante-huitard, surtout lorsque la société se crispe, connaît des phases de subduction. Le mouvement social de 1968 avait touché toutes les couches de la population et fut marqué par une soif libertaire et utopique de transformation sociétale, sociale, économique, politique et culturelle. Face à une société traditionnelle figée et repliée sur elle-même, étudiants, ouvriers, chômeurs engagèrent leurs contestations contre les visages de l’autorité par le biais de débats, de prise de parole et de discussions ardues à même la rue. Il s’agissait en grande partie de refaire le monde entre contestations vives et violentes, revendications confuses et utopiques, et façons de concevoir naturelles et festives. Tout cela s’est poursuivi avec le développement de nouveaux militantismes qui ont choisi ces formes de contestation et de mobilisation pour promouvoir l’autogestion, l’écologie, le féminisme ou les cultures identitaires locales…

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A Montpellier en janvier dernier, le projet FMR, à lire « éphémère », a réuni de multiples artistes dans un Home Street Home pour faire vivre une dernière fois des lieux avant leur démolition. L’idée était l’appropriation physique et virtuelle, de l’espace et du temps, pour faire éclater l’expression artistique et visuelle du Street Art. Le mariage parfait entre la réalisation personnelle, la créativité, la pluridisciplinarité et la valorisation ; l’alliance de la liberté de créer et de la diffusion d’idées au plus grand nombre grâce au choix de règles artificielles temporaires : un lieu, un moment.

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Banksy déclarait « Les personnes qui représentent l’autorité n’en ont bien souvent que peu pour elles-mêmes. ». Ainsi pour s’affranchir du message monotone et uniforme d’une société embourgeoisée, axé sur le consumérisme et le politiquement correct, l’artiste précurseur a (re)trouvé l’arme : « Un mur est une arme redoutable. C’est l’une des plus dangereuses avec laquelle vous pouvez frapper quelqu’un. », car « L’art devrait troubler notre confort, et conforter nos troubles. »

Après les émeutes de 2011 en Grande Bretagne, l’artiste avait fait diffuser une histoire des héros modernes de la désobéissance civile dans The Antics Roadshow. Alors que David Cameron diagnostiquait un « effondrement moral » de son pays, et promettait « un nouvel ordre un peu flippant », Banksy était parti pour un tour du monde des « excentriques » et néo militants politiques. En France, il croisât l’artiste Princesse Hijab qui avait décidé de déssiner des voiles sur les enseignes publicitaires pour interpeller, questionner, faire réfléchir.

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La liberté fut au cœur de Mai 68. Dans Mai 68, la philosophie est dans la rue, Vincent Cespedes affirme que le Polémos (en grec, le « clash ») est l’initiateur de celle-ci. De par la confrontation, la comparaison de thèses ou de personnes et la mise en présence d'un problème auquel on doit faire face, le clash remettrait en question ce qui va de soi, obligerait à répondre par un jugement critique. Ainsi, être « clashé », serait être délogé de ses préjugés, sommé de répondre à la rébellion questionneuse et « clasher » signifierait « prendre conscience » (pour le clasheur) et « faire prendre conscience » (pour le clashé). Notre société ne tolère que peu ce mode de fonctionnement car il pose la question du sens et donc du risque de la juger insensée.
L'obéissance demande « comment ? » et la désobéissance « pourquoi ? »

Déjà, en 2010 dans un précédent film, Faites le mur ! (Exit through the gift shop) Banksy avait voulu faire découvrir les concepts philosophiques et artistiques du Street Art au travers d’un documentaire entre road movie et portraits d’artistes de rue, comme le fameux Invader (dont certaines mosaïques sont encore à croiser dans le clapas !). Avec Montpellier : un écusson versus Street Art, j’avais tenté de pénétrer la complexité du sens des messages et la richesse des œuvres dans un centre historique devenu terrain de jeu et d’imagination.

Soif de découvrir ! Envie de liberté et d’échange! Rien n’est jamais bien loin !

Banksy a trouvé à Montpellier deux drôles de dames qui vous proposent les 27 et 28 juin prochain de faire le mur ! Un clin d’œil subtil au film, mais aussi un souhait de fugue artistique, à partager, pour fêter l’été et embellir temporairement un environnement urbain dégradé, manquant de sens et d’esthétique.

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Les palissades actuelles sur le parvis de la Poste Rondelet sont dégradées par des collages sauvages et publicitaires. Le paysage est devenu peu avenant pour les riverains et les visiteurs. Les acteurs du quartier ont trouvé vital de redonner couleurs et peps pendant les trois ans de travaux à venir. Ces palissades vont donc disparaitre pour laisser place à un mur de 40 mètres de long sur 2 mètres de haut, une sorte de feuille blanche propice à accueillir plusieurs univers artistiques.

Sous l’impulsion de Coralie et Florine, amatrices et collectionneuses de Street Art et d’art contemporain sous toutes leurs formes, et en partenariat avec l’association de commerçants Autour de Rondelet, le comité de quartier Clerondegamb (à la recherche d’actions revalorisant le Quartier), la CCI de Montpellier (qui travaille en faveur de la dynamisation du commerce et à l’amélioration de l’esthétique, élément fondateur de l’attractivité commerciale) et  La Poste (propriétaire de la palissade pendant les 3 ans de chantier), Le mur va devenir espace artistique. Montpellier love Street Art et c’est dans le prolongement de plusieurs projets et actions que le quartier s’ouvre avec Montpellier fait le mur ! pour le lui prouver.

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Durant ces deux journées estivales, le mur va s’offrir à une dizaine d’artistes venus de divers horizons. Dans un choix éclectique dans les techniques (pochoir, bombes, peinture, dessin, collages), ils feront une performance artistique de live painting d’envergure sur un Mur en plein centre ville, à l'instar de Paris, rue Oberkampf ou Marseille, Cours Julien.

Voir et découvrir : STEW (qui avait participé à la tour 13) et ses pochoirs de personnages et oiseaux inspirés du Japon, Romain FROQUET du collectif 9ème concept qui s’inspire de l’art tribal africain et sud américain pour créer « Urban Tree », un arbre qu’il décline au cœur des villes, symbole d’humanité et de vitalité, SIKO et son univers géométrique coloré, LILI B et sa poésie féminine composée de motifs floraux en noir et blanc, pochoir de papillon et dentelles de papier…et bien d’autres dont les noms seront dévoilés au fur et à mesure sur la page Facebook de Montpellier love Street Art. Envie de faire connaître également et de mettre en avant des artistes montpelliérains émergents, tels que SUNRA & OUPS.

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Le Mur est destiné à accueillir lors de prochains évènements les performances de plusieurs autres Street artists, qui recouvriront celles de leurs prédécesseurs.

Un projet artistique mais également social, animé par la volonté de donner de l’âme à un quartier populaire qui refuse d’être enfermé dans des stéréotypes, et qui souhaite changer l’image d’abandon ou de laisser-aller. En parallèle à l’évènement, les Street Artistes exposeront leurs œuvres, sérigraphies et originaux, proposées à la vente pour tous les budgets, dans la jeune galerie d'art Studio 411 du quartier, située à une rue du mur, le temps d'une exposition, qui durera du 28 Juin au 19 Juillet 2014.

Liberté de création et esprit de 68 pour remettre « l’imagination au pouvoir » ? Une réplique sismique pour égayer nos visages et nos idées ? Un trouble artistique pour faire fissa de nos idées reçues et s’interroger sur notre société ? A chacun et chacune de trouver les réponses à ses propres questions !

Les années qui précédèrent et suivirent 1968, furent les plus riches de la seconde moitié du XXème siècle, tant sur le plan artistique que dans les sciences sociales.
Une véritable culture populaire (par le peuple, pour le peuple, mettant en scène le peuple) y a fait irruption sur une scène culturelle dominée par la médiocrité bourgeoise (exception faite bien sur de quelques géniaux précurseurs).Dans tous les domaines ces années furent un âge d'or. Depuis la fin des années 70 force est de constater un tarissement général de la créativité artistique et de la pensée critique. Ayons peut-être l’espoir d’une nouvelle renaissance par l’intermédiaire de l’Art de Rue ! 

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Mai 1968. La Beauté est dans la rue, [Montpellier] BNF

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Concernant la pensée philosophique, l'époque vit se développer une critique radicale du système dans ses fondements. Caractéristique rare, l'objet des sciences sociales (la société) put être étudié en mettant à plat tous les a priori et tous les préjugés, véhiculés implicitement ou non par le cadre de pensée dominant, notamment ceux sur la nature humaine et l'ordre social "naturel". C'est à dire à l'opposé des pseudo-intellectuels d'aujourd'hui dont la pensée est circonscrite à l'intérieur de l'idéologie du néo-libéralisme. "L'imagination au pouvoir", ce n'est pas un simple slogan, c'est la condition même de toute pensée novatrice et radicalement critique. Et cela s'oppose au "réalisme" érigé en valeur.

« Je voudrais être un agitateur pour les réguliers, et parvenir à ce qu'on laissât s'exprimer les irréguliers. » écrivit Michel Foucault. Retrouvons l’esprit d’agitation !

Laurent Beaud

P.S. Merci à Florine pour Montpellier fait le mur ! ;-) . 

D’ici là, « Dans le tourbillon de la ville, nos lettres s’expriment en silence. Pour les êtres de bien habiles à penser les nuances ont un sens. ». Jouez et participez au projet StDsgn ;  retrouvez les lettres éparpillées, photographiez-les et recomposer votre vision du projet.

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