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le Kaléidoscope....
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28 octobre 2014

Socialisme: Crise de confiance, Crise d'identité ou Crise de foi?

Alors que ces derniers mois sont rythmés par l’annonce de résultats économiques et sociaux plus catastrophiques les uns que les autres, alors que le Parti Socialiste a recouvré le pouvoir de décision depuis près de deux années en France, alors que nos concitoyens préfèrent l’audace à l’attentisme, il devient de plus en plus surprenant de voir diverses figures de proue s’accaparent le débat sur le sens des engagements, des idées ou des valeurs sans réellement en convenir avec la base. Les mots « Socialisme », « Socialiste » ou « Progrès » sont-ils devenus en si peu de temps des gros mots, en raison du fait qu’il faut trouver rapidement des solutions aux fléaux de nos sociétés ? L’idéologie doit-elle, dans l’absolu, s’extirper ou s’émanciper du contexte et des situations de réalité, pour que l’élite puisse continuer à convaincre, à gouverner ? Les idées déclarées par certains comme « passéistes » doivent-elles être balayées pour laisser place à une forme de modernisme, ou de réformation qui ne saurait s’en inspirer ? De façon plus claire, n’est il point possible de réfléchir le présent et l’avenir en s’affranchissant des réflexions plus anciennes ? Pour le peuple de gauche, il s’agit de s’interroger, de réfléchir, alors que bon nombre de nos dirigeants imposent les réponses !

mendès

En 1899, dans Réforme sociale ou révolution ?, Rosa Luxemburg invectivait"Quiconque souhaite le renforcement de la démocratie devra souhaiter également le renforcement et non pas l'affaiblissement du mouvement socialiste ; renoncer à la lutte pour le socialisme, c'est renoncer en même temps au mouvement ouvrier et à la démocratie elle-même."

Alors oui, vous allez me dire que le monde a changé ! Et effectivement, il a changé. En premier chef, il semble acquis que la démocratie via le modèle républicain en France soit le cœur de notre société. Ensuite le changement de perception du modèle économique dans lequel nous vivons, le phénomène de mondialisation aidant, a imposé, adoubé le libéralisme comme quasiment l’unique perspective de développement. Enfin, il apparaît que depuis 2008 les crises s’engendrent les unes les autres à l’image d’un jeu de domino allant du réel vers l’idéal ; alors que les progressistes et leurs fondements politiques ont toujours bataillé à l’inverse, transformer l’idéal en réel. Les crises financière, économique, sociale et écologique ont mené inévitablement vers des crises morale, éthique et politique. En effet, beaucoup de citoyens semblent ne plus vouloir croire au progrès, à l’intérêt général et collectif, lorsque ils ne voient point résolution de ces crises, ou qu’aucune alternative positive et constructive n’est proposé à la résolution de celles-ci. Ainsi la défiance de l’électorat, socle de notre démocratie, envers les idéologies politiques de progrès, envers ses partisans ou ses représentants, a profondément fragilisé ce que la société croyait acquis, a affaibli le Socialisme de nos luttes au point de s’en interroger.

durkheim

Mais n’aurait il pas fallu l’action volontariste par conviction aux questionnements ? Et nous en avons toujours l’opportunité. Alors que les propositions sont devenues des promesses, que le climat global ambiant est au repli de soi et à l’individualisme, que le message des urnes a réclamé plus de gauche, élevant le populisme et l’extrémisme droitier au rang d’alternative, était-il judicieux de faire table rase de l’identité socialiste aux motifs d’ambitions purement personnelles qui ne sauraient s’inscrire dans une tradition.

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Voilà que sous l’impulsion de son 1er secrétaire, Jean-Christophe Cambadelis, le Parti Socialiste mets en œuvre une nouvelle convention dite « des états généraux »  pour « refonder l’identité socialiste ». Pour Sûr, il y a des intérêts à actualiser les dogmes socialistes et à faire vivre le débat, mais est-il indispensable de ne pas renier ou balayer les conceptions portées par nos brillants aïeux. Tout comme le « prolétariat » d’hier, composé d’ouvriers et de paysans, réalisait sa lutte des classes face à la bourgeoisie des patrons, le « prolétariat » d’aujourd’hui, regroupant caissières, employés et chômeurs, ne doit-il pas réaliser la sienne face à la finance et aux actionnaires.  Les situations d’hier et d’aujourd’hui ont pour trait commun que le socialisme préconise toujours une nouvelle organisation de la société en vue de faire prévaloir les intérêts généraux sur les intérêts particuliers et de réaliser une plus grande justice et fraternité entre les hommes.

blum

Cette transposition de l’idéologie dans l’action politique appliquée aux situations économiques du XXIème siècle a été parfaitement décliné par François Ruffin dans un article intitulé Partage des richesses : la question taboue, publié dans Le Monde Diplomatique en 2008 : "L'extravagante hypothèse conservatrice se trouvait ainsi confirmée : avec une croissance de 2%, parfois déguisée en "crise", tout progrès social serait impossible, voire rendrait "inéluctables" des reculs en série. Cependant, cette croissance qualifiée de "molle", aux alentours de 2%, correspond à la moyenne observée au cours du XXe siècle, hors "trente glorieuses". Un siècle qui ne se priva ni de progrès technique ou humain, ni de bâtir des protections salariales. Désormais, la justice sociale devrait néanmoins patienter, espérer une improbable - et pas vraiment souhaitable - hypercroissance à 4%, 5%, 6%, voire plus."

compère

S’il est très bien de mettre à contribution les militant(e)s au débat sur l’identité de leurs engagements, il n’en n’est pas plus détestable d’observer un dirigeant travaillant à vider la substance de l’outil dont il est issu pour s’en accaparer la tête tel un Tony Blair dégustant une cargolade à la catalane.

«Il faut en finir avec la gauche passéiste, celle qui s’attache à un passé révolu et nostalgique, hantée par le surmoi marxiste et par le souvenir des Trente Glorieuses" a déclaré Manuel Valls ; Sur sa lancée il revient sur son désir de retirer « Socialiste » et « Socialisme » de ce que devrait être la gauche dite « moderne et réformiste ». Un drôle idée du « Progrès » selon moi ! 

Le Premier ministre n’a pas hésité à critiquer les "mauvais choix" de François Hollande, à propos de la hausse excessive de la fiscalité par rapport à la diminution de la dépense publique. Il regrette même que l’on n’ait pas tendu la main à Bayrou en 2012, ce qui, en filigrane, dessine une ouverture au centre dont on voit mal comment elle pourrait se concrétiser.

Si Manuel Valls est aussi pragmatique qu’il le dit, peut-être devrait-il dessiner des solutions à la mesure du XXIe siècle, en matière d’environnement, d’énergies, que l’actuel modèle, hérité justement des Trente Glorieuses et que le "blairisme" n’a jamais soldé. Mais pour cela il y faudrait plus que du pragmatisme, il y faut de l’imagination, et non ces petits calculs d’image, de courants, de congrès, de motions.

Lorsque l’on lance de tels propos, qui nécessairement amènent leur lot de réponses, on ne peut passer à côté de l’idée que les états généraux pour refonder l’identité du Parti Socialise pourrait être là en grande partie pour adapter ou modeler l’outil à l’homme, et non pousser l’homme à respecter l’outil et ses idées...Jean-Christophe Cambadélis a réagi dans un premier temps à l’AFP en déclarant préférer que l'on "garde" le "beau nom" de parti "socialiste". "Si je suis favorable à changer la carte d'identité du Parti socialiste, je ne suis pas favorable au changement de nationalité", a ajouté le premier secrétaire du parti. "Je reste sur la position de François Mitterrand. Socialiste est un beau nom qui a fait ses preuves, autant le garder".

"Le débat, il n'est pas entre socialistes, il est d'abord avec les Français, et moi je ne dévierai pas de ma ligne", a répondu Manuel Valls. "Je sais que je dois conduire des réformes. Elles sont nécessaires pour le pays, elles sont nécessaires pour les Français, je ne dévierai pas de cette ligne, rien ne me fera dévier, c'est la bonne ligne", a-t-il ajouté.

jaures

Le premier secrétaire, Jean-Christophe Cambadélis, a alors exhorté les socialistes, dans une déclaration solennelle, à retrouver leurs nerfs et à débattre sereinement "pour la réussite de la fin de ce quinquennat". "Les socialistes doivent rester unis, les courants socialistes doivent débattre sans se battre, les dirigeants doivent maîtriser leur expression", a-t-il dit. "Nous le devons à notre pays, à la gauche, à notre Histoire." "Balayons les querelles subalternes et les combats secondaires de personnes, cessons de nous distribuer de bons et de mauvais points", a t’il poursuivi.

Et pendant ce temps là, qu’en pensent les militant(e)s socialistes ? Dans un questions/réponses organisé le 22 octobre 2014 dans Le Monde , le journaliste politique Nicolas Chapuis réponds à la question posée par un visiteur : «  Y a-t'il des enquêtes pour savoir comment se positionnent les militants socialistes dans cette guerre fratricide ? Non. Pour savoir ce que pensent les militants, il faudrait faire un congrès. C'est l'une des grandes questions. Un certain nombre de socialistes réclament un congrès rapide pour résoudre ces problèmes. Mais l'exécutif n'est pas pressé d'aller se frotter aux militants, qui sont très remontés. Cependant, les ressentis que j'ai du terrain (visite dans les sections, dans les fédérations) c'est que les militants sont surtout désabusés. Ils viennent de moins en moins aux réunions. Il y a plus grave que de faire face à la colère des siens, il y a l'indifférence. »

VlG1

Alors si « Vive le Débat ! », débattons ! L’espace de débat que procure l’organisation d’un congrès n’a t’il pas in fine pour but de construire une ligne politique ? Si Monsieur le 1er ministre vous souhaitez imposer votre propre ligne sans le débat, vous êtes libre de laisser les « socialistes » dans leur maison. "L'homme moderne est l'esclave de la modernité : il n'est point de progrès qui ne tourne pas à sa plus complète servitude." Ecrivait Paul Valéry dans Regards sur le monde actuel.

« Vive la Gauche ! »

Laurent Beaud

P.S. Enfin, si nous voulons savoir qui nous sommes, il suffit en premier lieu de réapprendre d’où nous venons. Pour cela, la lutte pour le Socialisme ne passera que par la relecture de ceux qui sont passés avant nous. 

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